8/ Le maintien de la dissociation structurelle de la personnalité

Introduction
Page 29
Plus le niveau mental de l’individu est bas, plus il est obligé de s’appuyer sur des actions substitutives qui peuvent le protéger contre des émotions et des pensées perturbantes, mais qui sont en conflit avec l’intégration des souvenirs traumatiques et des parties dissociatives liées à ceux-ci.
Le niveau mental des survivants de traumatismes reste bas lorsqu’ils souffrent de carences importantes au plan de leurs compétences relationnelles et émotionnelles. Dans de nombreux cas, ces déficits sont essentiellement dus à des carences chez les personnes qui ont pris soin d’eux, au plan des modèles transmis et de la formation : beaucoup de survivants ont en effet grandi dans des milieux où ces compétences n’étaient jamais utilisées.
Un niveau bas ou modeste peut être compensé par des soutiens sociaux et relationnels qui aident de façon décisive un survivant à intégrer les expériences traumatisantes. Cependant, beaucoup de survivants n’ont que peu de soutien, voire pas du tout. Ils affrontent seuls la tâche monumentale de l’intégration et la trouvent au-dessus de leurs forces.
Les modifications neurobiologiques consécutives au traumatisme entravent aussi l’intégration.


Autres billets sur Le soi hanté

1/ Le soi hanté, dissociation structurelle et traitement de la traumatisation chronique
2/ Pour le thérapeute dans la dissociation structurelle par Erik De Soir 
3/ La dissociation structurelle de la personnalité

4/ Diagnostics et dissociation structurelle

5/ Notion de niveau mental

6/ Les actions substitutives

7/ Les actions intégratrices

9/ Les phobies qui maintiennent la dissociation structurelle
10/ Caractéristiques du souvenir narratif autobiographique

7/ Les actions intégratrices

Introduction
Page 27
Dans le domaine des traumatismes, le terme d’intégration est un mot courant, qui signifie que les patients doivent assimiler leurs expériences traumatisantes (et les parties dissociatives de leur personnalité) pour pouvoir avancer dans leur vie. Mais l’intégration fait aussi partie de la vie de tous les jours, elle y est indispensable. Ce sont les actions d’intégration qui requièrent les degrés les plus élevés d’énergie et d’efficacité mentales.
[…]
Quelles sont les actions mentales particulières qui sont impliquées dans le processus d’intégration et comment peut-on les mener à bien ? Pour traiter efficacement les personnes traumatisées, il est utile de comprendre deux grands types d’actions mentales intégratrices : la synthèse et la réalisation.
La synthèse. La synthèse est une action intégratrice majeure, au cours de laquelle nous lions et différencions une série d’expériences internes et externes, dans l’instant et au fil du temps. La synthèse comprend la liaison et la différenciation de perceptions sensorielles, de mouvements, de pensées, d’affects, avec un sentiment d’identité. Par exemple, nous savons en quoi une personne ressemble à une autre (liaison), mais aussi en quoi elle en est différente (différenciation) et en quoi notre situation présente est similaire à notre passé, mais différente aussi. Nous savons encore que le fait d’avoir des pensées folles et celui de commettre des actes fous se ressemblent par certains côtés, mais diffèrent aussi significativement l’un de l’autre. En grande partie, la synthèse est automatique et a lieu hors de la conscience.
Notre capacité à la synthèse fluctue avec notre niveau mental ; pat exemple, chez une personne bien éveillée, la synthèse sera de meilleure qualité que si elle est fatiguée. La synthèse assure l’unité normative de la conscience et de l’histoire de l’individu. Des altérations de la conscience et des symptômes dissociatifs peuvent apparaître lorsqu’elle est incomplète.
La réalisation. La réalisation est une action mentale intégratrice liée à la première, mais de niveau plus élevé. Elle comprend les actions mentales de la prise de conscience de la réalité telle qu’elle est, de son acceptation, puis de l’adaptation réfléchie et créative du sujet à la réalité. La réalisation inclut le degré auquel l’aboutissement d’une expérience est atteint (Janet,  1935a ; Van der Hart, Steele, Boon et Brown, 1993). Elle consiste en deux actions mentales qui font sans cesse mûrir la perception que nous avons de nous-même, des autres et du monde (Janet, 1903, 1928a, 1935a). La première concerne l’intégration d’un vécu avec le sentiment explicite, personnel, qu’il nous appartient : « C’est à moi que c’est arrivé, et c’est moi qui en pense ceci ou cela ». La seconde consiste à être fermement ancré dans le présent, tout en intégrant son passé, son présent et son futur. Elle se manifeste à travers l’adaptation maximale et réfléchie des actes du sujet dans le présent.


Autres billets sur Le soi hanté

1/ Le soi hanté, dissociation structurelle et traitement de la traumatisation chronique
2/ Pour le thérapeute dans la dissociation structurelle par Erik De Soir 
3/ La dissociation structurelle de la personnalité
4/ Diagnostics et dissociation structurelle
5/ Notion de niveau mental
6/ Les actions substitutives

8/ Le maintien de la dissociation structurelle de la personnalité

9/ Les phobies qui maintiennent la dissociation structurelle
10/ Caractéristiques du souvenir narratif autobiographique