La différence entre la danse et la Danse-Mouvement-Thérapie

Quelles sont les différences ?

Un cours de danse

Un cours de danse cherche à enseigner un langage que le pratiquant va s’approprier en l’inscrivant dans son corps. C’est comme un cours de langue, de natation. On apprend un langage bien défini qui passe par une technique. On s’entraîne dans cette technique jusqu’à la maîtriser. On cherche à se perfectionner de plus en plus. C’est la recherche d’une performance où l’art abouti est le but.

La Danse Mouvement Thérapie

Dans la danse-mouvement-thérapie on utilise le langage de la danse. Il est un moyen et non une finalité. On l’utilise comme instrument pour que le pratiquant puisse exprimer ses émotions. La technique est au service de l’expression. Elle est un support du langage corporel, car on s’exprime par le corps.
Donc il n’y a pas d’objectif d’un perfectionnement d’un travail technique.
Au contraire, on utilise de préférence un langage simplifié accessible à tout le monde, chacun en fonction de ses possibilités. Un geste minimal peut exprimer beaucoup de choses : un regard, une attention.

Les objectifs sont donc différents

La danse propose l’acquisition et la maîtrise d’une technique, acquérir le domaine sur quelque chose comme une langue. La danse-mouvement-thérapie (DMT) propose l’expression d’un chemin intérieur qui passe par un processus thérapeutique ce qui veut bien dire qu’il s’agit de restaurer des blessures souvent liées à l’estime de soi, le manque de confiance en soi-même, etc. On est dans la dimension du soin mais du soin à travers l’art. L’art est un moyen et la thérapie un but dont l’objectif est la transformation de soi-même : Aller mieux.

Un peu d’histoire

En fait tout a commencé au début du XXe siècle quand des psychiatres ce sont intéressés aux productions artistiques des personnes internées dans les hôpitaux psychiatrique. En 1950 a eu lieu la première exposition à Sainte-Anne avec plus de 2000 œuvres plastiques créés par des malades mentaux. Le fait d’exprimer ses émotions soulageait beaucoup ces patients. C’est à partir de là que l’on a pensé l’art comme moyen thérapeutique ; et puis les autres spécialités se sont ajoutées : musicothérapie, dramathérapie, danse thérapie, danse-mouvement-thérapie.
Un thérapeute est nécessaire pour accompagner le processus créatif et transformateur du patient. Donc là on voit bien qu’il ne suffit pas d’être un professeur de danse ou animateur artistique. Être art-thérapeute exige une formation spécifique qui inclut le domaine de l’art mais aussi le domaine de la psy : notions de psychologie, de psychanalyse, de psychothérapie, de processus psychosomatique. Savoir faire une lecture lecture psychocorporelle, Nous devons pouvoir accueillir pleinement le patient ou le pratiquant, être à son écoute, percevoir ses besoins, ses talents et ses limites et surtout les respecter. C’est un travail centré sur la personne, sur l’autre.
On est plus à côté d’eux que devant eux comme un modèle.
On est ensemble dans l’empathie. On crée des liens. On aide dans le processus de naissance, de création, mais on est là aussi pour poser un cadre, des cadres, des limites. Un peu comme pour un enfant : faciliter le développement et en même temps donner une certaine direction, certains points de repères, structurer sans enfermer. On est vraiment à disposition de l’autre, On l’accompagne on le suit, on l’observe, on se donne. C’est très différent d’un professeur de danse qui n’est pas là pour écouter l’histoire de l’autre mais pour lui-même nous raconter une histoire. Les rôles sont un peu inversés : le professeur se fait suivre et le thérapeute suit, le professeur montre et le thérapeute amène à…, le professeur attend des progrès de performance technique et le thérapeute ne s’occupe pas de l’excellence ou de la perfection du résultat. Il n’attend aucun résultat, Il est là pour aider le patient à faire son propre parcours, à s’exprimer.

A qui s’adresse la Danse Mouvement Thérapie ?

La DMT s’adresse à tous publics. Aussi bien à des personnes porteuses d’un handicap physique ou mental, qu’à des personnes qui cherchent un bien-être, à mieux se connaître, à se libérer de certains blocages émotionnels comme la peur, la timidité, le manque de confiance etc. et qui cherchent à s’épanouir. Bien sûr il ne vaut mieux pas mélanger dans un même groupe des personnes avec des caractéristiques trop différentes.
La DMT est conseillée aux personnes handicapées car on travaille beaucoup sur le corps (axialité = verticalité, centrage = au niveau du bassin, enracinement, coordination motrice etc) toujours en musique pour faciliter l’expression des émotions.
On peut travailler aussi sur les sons et la respiration. La DMT est recommandée pour les femmes après un cancer du sein, pour la reconstruction de leur schéma corporel mutilé et fragmenté mais aussi pour la reconstruction d’une image meilleure d’elle-même.
On la recommande aussi aux adolescents ou adolescentes qui ont des problèmes d’anorexie et de boulimie car ils ont une perception de leur corps déformée.
Et pour bien d’autres cas encore : pour des enfants par exemple en scolarité afin de canaliser mieux leur énergie : s’éclater mais aussi apprendre à se contenir, à se calmer, à s’harmoniser.
On parle de danse-mouvement-thérapie, en effet car il ne s’agit pas seulement de danse, mais de mouvement vécu ou je dirais même un mouvement ressenti qui inclut toute une dimension sensorielle basée sur des sensations et sensibilité captées par et dans le mouvement. On sort du mouvement mécanique pour arriver au mouvement ressenti, qui intègre également les émotions.
La DMT est un voyage sensoriel, plein de couleurs, d’odeur, d’imagination.
La DMT n’est pas un apprentissage solitaire.
On travaille également sur une dynamique de groupe. Il y a toute une première phase qui consiste à la découverte de soi-même, puis en miroir ou en accordage avec l’autre, où on apprend également à suivre l’autre puis à être suivi par l’autre. Ainsi on pourra développer aussi bien un rôle d’acteur qu’un rôle de récepteur.
On apprend aussi à donner puis à recevoir.
Enfin on danse aussi tous ensemble en cercle avec le même rythme, unis par la même fréquence, ce qui pourra aider à développer un processus d’intégration sociale.
La DMT peut également se pratiquer en séance individuelle où « l’histoire » de chacun aura une place privilégiée et en dialogue corporel avec le danse-thérapeute.

 

La danse classique et la respiration

photo 1©Sylvie Lagache

« Je danse, parce qu’aucune partie de mon corps doit rester sans le vécu du religio (lien au divin). »

Socrate

Méthode de conscience corporelle appliquée à la danse classique

Cette méthode qui unit danse classique et respiration utilise tous les codes et techniques de la danse classique conventionnelle (exercices, pas, enchainements et chorégraphies) ainsi que sa structure et déroulement de cours (échauffement sol, barre et centre).
 La différence est qu’on utilise la respiration avec le mouvement car un mouvement soutenu par la respiration (le souffle) apporte à la danse classique une dimension plus ample, plus puissante et en même temps plus légère. Cette méthode permet également d’intégrer le pratiquant dans sa totalité corps-mental- émotion.
J’ai développé et enseigné cette méthode au Brésil pendant 30 ans, dans différents endroits : d’abord au sein d’une compagnie de danse moderne professionnelle le “Ballet Stagium”, puis dans mon école de danse “Espace Sylvie Lagache” à São Paulo. Elle a été enseignée aussi au cours d’un atelier donné aux danseurs du Théâtre Municipal de São Paulo.
Elle est née d’une rencontre “Occident-Orient” qui m’a fait intégrer mon vécu de danse classique à l’hatha yoga appliqué à la danse classique de Lilian Arlen, l’aïkido de maitre Noro et le qi gong. Cette méthode propose un travail du corps qui ne passe plus par un entrainement intensif musculaire, mais énergétique en utilisant les centres d’énergie : du coeur, plexus solaire et abdominal (centre de gravité – hara) comme moteurs du mouvement, unifiés par la respiration. Cependant cette méthode de conscience corporelle ne focalise pas sur la performance technique mais sur la qualité du mouvement dans son authenticité.
En fait cette méthode a connu ses débuts en France quand j’étais danseuse, à l’âge de 21 ans et quand j’ai connu la pratique de l’aïkido, un art martial de défense, avec Maître Noro. Ainsi, très rapidement j’ai introduit la respiration aux mouvements de danse de base classique. Tous les exercices et les propositions de mouvements suivent le même principe, à savoir : le recueillement à l’inspiration et l’expansion à l’expiration. C’est aussi le principe du tai chi chuan, à la différence que la danse utilise des rythmes et des intensités variés, liés à des émotions, des sensations, des ressentis. Elle n’a pas un mouvement linéaire comme le tai chi, mais au contraire, est basée sur des contrastes: le lent/le rapide ; le léger/le lourd ; le haut/le bas ; le continu/ la rupture; le posé/le soudain; le prévisible/l’imprévisible, etc.. c’est comme une composition musicale en mouvement.
C’est aussi un travail qui se projette dans l’espace en utilisant des intensités énergétiques différentes, principalement le léger et le fort qu’on pourrait associer au féminin et au masculin, ou bien en langage oriental : au ying et au yang et en langage symbolique : au ciel et à la terre.
On se projette
On saute
On tourne
On s’équilibre .
Pour travailler l’équilibre, j’utilise des exercices de hatha-yoga appliqués à la danse classique – méthode de Lilian Arlen – qui focalise la concentration mentale et la tonicité du plexus solaire (à la hauteur de l’estomac).
Un autre aspect important de cette méthode, c’est le jeu de mouvements de la cage thoracique et du bassin amplifié par la respiration. En effet, la danse classique utilise ces deux parties plutôt comme un seul bloc et explore par contre beaucoup les jambes et les bras. Personnellement je focalise la cage thoracique que je considère la maison de nos sentiments, de notre âme et l’expression du bassin liée à nos émotions plus primitives, à la terre, dimension très manifestée dans les danses africaines, par exemple. Le mouvement des bras part de la cage thoracique et se projette dans l’espace ; le mouvement des jambes part de l’abdomen, du centre énergétique vital (hara en art martial) pour faire contact avec le sol et donner de l’impulsion aux pas. Les extrémités: bras et jambes ne sont donc pas des centres moteurs ni conducteurs comme dans la danse classique conventionnelle, mais ils sont le prolongement du centre du cœur pour les bras et du centre abdominal pour les jambes. De cette manière cette danse acquière de la vitalité, conduite par l’énergie et non par l’effort musculaire. Elle devient vivante, respire et dépasse, par là-même, un concept d’esthétisme purement formel.
Ainsi nous pouvons nous élever vers le ciel (cage thoracique+ respiration et prolongement dans les bras) ; s’enraciner dans la terre (bassin,  jambes et pieds) et s’épanouir comme une fleur qui s’ouvre. C’est donc une danse qui nous permet d’être dans le mouvement présent et en même temps de le transcender, d’où s’inscrit sa dimension humaine et spirituelle.
Indépendamment de sa beauté, la danse quand elle travaille le côté organique, améliore la santé, en commençant par la respiration, qui oxygène le sang, les organes et les muscles. La respiration abdominale libère les tensions qu’elle rencontre sur son passage au lieu de contracter les muscles abdominaux et fessiers comme le fait la danse classique ou la gymnastique olympique. La partie émotionnelle se développe quand le corps est plus libre. Le mental s’ouvre par l’oxygénation du cerveau qui contribue au développement de la conscience, ce qui nous empêche de nous limiter à un entraînement mécanique. Ressentir le mouvement à travers la respiration ou sentir la respiration traverser le mouvement, permet d’éveiller notre potentiel créatif et intègre notre corps-mental-émotion. Le pratiquant se rencontre alors dans sa totalité corps-âme-esprit, expression de son essence humaine, conforme a considéré Fançois Delsartre au XIXème siècle.
photo 2
©Sylvie Lagache