L’auto-empathie, ou le devenir de l’autrui-en-soi : définition et clinique du virtuel

Logo-ElsevierL’empathie ou le devenir de l’ autrui en soi : définition et clinique du virtuel
Autre titre: Auto -empathy or the others-in-oneself’s evolution: Definition and clinic of virtual (English)
Auteurs: Tordo, Frédéric, Binkley Caroline
CRPMS (EAD 3522), université Paris-7 Diderot, 26, rue Paradis, 75480 Paris cedex 10, France
Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 8ter, rue Dr-Gabriel-Ledermann, 92310 Sèvres, France
Toute référence à cet article doit porter mention : Tordo F, Binkley C. L’empathie ou le devenir de l’ autrui en soi : définition et clinique du virtuel. Evol Psychiatr 2016 ; 81 (1) : pages (pour la version papier) ou Adresse URL [date de consultation] (pour la version électronique).
Source: In L’Évolution psychiatrique Dec 2012
Editeur: Elsevier Masson SAS
Langue: French
Résumé :
Objectifs
Les auteurs se proposent d’explorer un phénomène psychique, l’« auto-empathie », tel qu’il est mis en œuvre dans le contexte des espaces numériques et singulièrement dans la situation du joueur qui incarne un avatar (une figure de pixel) dans un jeu vidéo.
Méthode
Dans la perspective d’une ouverture théorique à la fois phénoménologique et psychanalytique, l’auto-empathie est le processus au cours duquel, en prenant la position de l’« autrui-en-soi », nous nous représentons notre monde subjectif – soit l’ensemble de nos états de subjectivité (actions, émotions, pensées) –, par relation empathique avec nous-mêmes. Cette relation d’auto-empathie correspond à une opération de distanciation, et d’appropriation symbolique, au cours de laquelle nous nous dédoublons, en mettant en œuvre notre faculté innée d’être à la fois sujet et objet pour nous-mêmes.
Résultats
La médiatisation de l’auto-empathie dans les mondes numériques permet de nous mettre à la place d’une figure qui nous représente – notre avatar –, de sorte que notre empathie est tournée vers nous-mêmes indirectement. Ce second temps d’empathie pour une figure virtuelle de soi, nommé « auto-empathie médiatisée » ou « auto-empathie virtuelle », favoriserait dans un troisième temps le développement d’une empathie pour soi. Enfin, le développement d’une empathie pour autrui serait soutenu dans un quatrième temps, par l’attention que les joueurs se portent les uns aux autres dans les jeux en réseau.
Discussion
Ces quatre hypothèses, illustrées par des cas cliniques, ouvrent une interrogation portant sur le cadre en psychanalyse. À l’adolescence, le travail de virtualisation, qui consiste en l’anticipation créatrice de ses possibilités subjectives, apparaît régulièrement contrarié. La duplicité psychique n’est plus à même d’opérer une distance symbolisante entre le soi réel et le soi virtuel, entre le soi subjectif et le soi subjectivant. L’autrui-en-soi est inefficace à proposer à l’adolescence un dialogue empathique avec soi-même. En conséquence, l’autoreprésentation flirte avec l’effondrement, en particulier dans les états de cassures subjectives. Or, les espaces numériques pourraient bien être pour l’adolescent des supports indirects d’appropriation d’expériences subjectives.
Conclusion
Nos réflexions ont conduit à penser l’auto-empathie comme la réalisation de l’autrui-en-soi qui permet de nous représenter notre propre monde subjectif. L’auto-empathie médiatisée par un avatar peut donc être décrite comme une représentation par empathie de notre part subjective contenue par ce personnage. Dès lors, l’espace du jeu vidéo se présente comme un espace de subjectivation.
Type de document: ArticleISSN:0014-3855DOI:10.1016/j.evopsy.2014.02.002Numéro d’accès:S001438551400036X
Droits d’auteur:Copyright © 2014 Elsevier Masson SAS All rights reserved.
Base de données:ScienceDirect

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L’art-thérapie et les mondes virtuels par Isabelle Roy

Logo de Cairn infoAtelier de jeu vidéo
Roy, I. (2012). L’art-thérapie et les mondes virtuels. Enfances & Psy, 55(2), 89-94. doi:10.3917/ep.055.0089.


Résumé

Cet article traite du jeu vidéo comme possible médiation artistique dans un dispositif d’art-thérapie. Il décrit le positionnement ainsi que la démarche de l’art-thérapeute ; il rend compte de ses observations à travers un atelier de jeu vidéo coanimé avec un psychologue et mis en place dans un hôpital de jour avec des enfants autistes.


Isabelle Roy, art-thérapeute, Paris. DU art-thérapie Paris Descartes Sainte-Anne

L’art-thérapie est une psychothérapie avec l’art [1] La création artistique n’est pas thérapeutique en soi. Quoi qu’il en soit, l’art donne la possibilité à l’individu de s’exprimer autrement que par des mots. Il permet de créer des images, des univers, des concepts. Le processus créatif permet cette traversée menant à l’émergence d’une production artistique. Ce n’est pas la valeur esthétique d’une production ou de l’excellence qui importe, mais le processus même de sa réalisation.


[1] « L’art-thérapie est une psychothérapie avec l’art. Il s’agit ici d’utiliser l’expression plastique avant tout comme une médiation pour un travail verbal. L’œuvre est ainsi considérée comme susceptible d’offrir des possibilités élargies de communication de soi pour les patients présentant des difficultés d’expression verbale. Elle est aussi ce qui permet de médiatiser la relation entre le patient et le thérapeute dans le cadre contenant de l’atelier » (Dubois, 1994).

Le processus créatif

Le processus créatif est cette faculté de l’individu à imaginer, construire, élaborer une idée, une œuvre, un objet, un scénario. La créativité réside dans la capacité de se servir des choses, des idées et des situations existantes et d’en faire une association originale.
L’acte créatif est aussi et surtout la capacité à utiliser des éléments qui surgissent alors qu’on cherchait autre chose, dans la faculté de s’emparer des accidents, des imprévus, d’accepter le décalage entre ce que l’on avait imaginé et ce qui se matérialise sous nos yeux. Le travail de création change, modifie ou transforme la perception que l’on a de son environnement et de son propre monde intérieur. La médiation artistique utilisée favorise un processus de créativité et permet au patient de s’immerger dans une expérience à l’issue de laquelle il sera « transformé ».

Par ailleurs, l’art-thérapie ne vise pas à la levée d’un refoulement de représentations refoulées. Elle ne vise pas non plus à l’expression de conflits inconscients susceptibles d’être interprétés.

Elle cherche à encourager la survenue d’un processus créatif en tant que fin en soi. Des significations subjectives conscientes ou inconscientes investissent l’objet créé évidemment connoté. Il peut être une représentation dérivée de l’image du corps. Mais ces dimensions relèvent de la psychothérapie et non de l’art-thérapie.

Art-thérapie et psychothérapie

En art-thérapie, l’effet thérapeutique recherché est la catharsis propre à l’acte créatif, pour lui-même et en dehors de toute analyse psychodynamique ou sémiotique. Autrement dit, les deux approches, art-thérapie et psychothérapie, sont distinctes mais complémentaires.

Le rôle de l’art-thérapeute

L’art-thérapeute aide le patient à créer, sans interprétation. Le rôle de l’art-thérapeute est de l’aider à aller jusqu’au bout de son processus créatif. Cette qualité d’accompagnement suppose que l’art-thérapeute soit un/une artiste. C’est un prérequis indispensable pour comprendre ce qui peut se passer pour un patient immergé dans un processus de création comme pour repérer et comprendre les nombreuses situations qui se présentent à une personne qui est dans cette dynamique créative. Savoir être présent, savoir se tenir à distance, savoir encourager, intervenir au besoin. Savoir conseiller, savoir protéger le patient contre d’éventuels dangers qui peuvent survenir lorsque quelque chose qui n’était pas prévu, pas pensé, émerge brusquement.

L’art-thérapeute est un artiste

Non seulement il maîtrise les outils et le langage artistique mais qui doit également impérativement avoir des connaissances dans le domaine psychothérapique. Ce bagage théorique lui permet d’être vigilant à ses propres réactions, à ses propres désirs. Ainsi, ceci lui d’être trop interventionniste et d’orienter le travail d’un patient selon ses propres désirs.

Atelier de jeu vidéo

Les jeux vidéo sont des univers ludiques invitant à la créativité. Dans la plupart des jeux, il faut construire soi-même son avatar ou modifier un avatar proposé. Par exemple, dans le jeu Spore, le joueur crée un organisme qu’il va doter d’attributs selon son bon vouloir et son inspiration du moment. Les jeux vidéo invitent aussi à inventer son propre parcours dans le monde virtuel. Chaque joueur imagine sa propre histoire virtuelle, parfois simples réponses aux contraintes du jeu, parfois création originale d’une action, d’une stratégie, d’une dérive, d’une subversion des règles du jeu. Les mondes virtuels sont des espaces d’incitation à la créativité.

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