Après les attentats du 11 septembre, ou Paris, comment la peur se surmonte

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Après les attentats du 11 septembre, de Londres, Madrid ou Paris, comment la peur se surmonte
Par &
11/09/2016
ATTENTATS – Il y a 15 ans, deux avions venaient se crasher dans les tours jumelles du World Trade Center. Depuis, bien d’autres villes ont vécu de telles tragédies. De Beyrouth à Karachi en passant par Tel Aviv, Gaza, Mumbaï ou Nairobi, Madrid, Londres ou Paris et, plus récemment, Nice, chacune a pansé ses plaies à sa manière, a dompté sa peur ou est encore en train de le faire.
Évidemment, comparaison n’est pas raison. Nombre de morts, lieux, commanditaires et modes opératoires, les attentats de Paris et ceux des trois grandes villes occidentales différent en de nombreux points. Cependant, les conséquences psychologiques que produisent ces tragédies sur la population peuvent être comparables. En ce sens, New York, Madrid et Londres ont certainement des leçons de résilience à nous apprendre, nous qui pensions avoir vécu le pire avec Charlie Hebdo puis le 13 novembre, mais qui avons dû faire face à Nice ou à Saint Etienne du Rouvray. « Des attaques de la sorte modifient la perception que nous avons de notre propre sécurité et de notre invulnérabilité », explique la psychologue madrilène Mónica Pereira interrogée par Le HuffPost et qui a travaillé sur les suites des attentats de Madrid.
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Augmentation immédiate du stress

Dans toutes ces villes, les psychologues et médecins ont pu constater une augmentation du stress, même chez ceux qui n’ont pas été directement touchés par les attentats. « Le désarroi est une réaction normale à une situation anormale », explique au HuffPost Lloyd Sederer, psychiatre et directeur médical du New York State Office of Mental Health, spécialiste du sujet. « Les terroristes veulent perturber l’équilibre émotionnel et économique d’une communauté, d’une ville, d’une région ou d’un pays. C’est insidieux : leur but est bien plus large que les tragiques conséquences pour les familles des victimes », ajoute-t-il.

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« Les tueurs sont revenus, eux ou d’autres, vivants ou morts… »

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« Les tueurs sont revenus, eux ou d’autres, vivants ou morts… »

Par Philippe Lançon
22 novembre 2015

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Instantanément, j’eus la sensation concrète d’être un fantôme et de marcher comme à côté de moi-même. Une sorte de brouillard gris m’environnait, un smog à l’éternité pesante et froide, quelque chose de sourd, de saturé et de renfermé. La vie, depuis quelque temps et difficilement, revenait à une espèce de normalité encadrée. Je dormais toujours très mal, mais je préparais chaque matin mon café.

Soudain, cette vie était de nouveau un rêve –  comme dans la nuit du 7 janvier

Les tueurs étaient revenus, eux ou d’autres, vivants ou morts, ils étaient là et ils continuaient le boulot, comme je l’avais craint sans trop le dire depuis des mois. J’avais beau être de l’autre côté de l’Atlantique, ils me (et nous) collaient aux basques et à la conscience, tel le sparadrap du capitaine Haddock. Je venais d’être pris de nouveau pour cible à travers celles du 13 novembre. Il n’y avait de sécurité ni pour moi, ni pour personne. La réalité, c’était eux, les tueurs. Je regardais le ciel bleu finissant entre les gratte-ciel, les gens qui parlaient, buvaient, mangeaient dans les cafés. Leur insouciance m’était interdite  ; elle m’isolait. Depuis cet instant, les nouvelles que je lis m’informent sur les tueurs, les blessés et les morts  ; elles m’informent aussi sur ce que je vis.

Je suis ici, à Manhattan, mais je suis là-bas

Dans la salle de rédaction de Charlie, et aussi, parallèlement, au Bataclan et aux terrasses de café. L’horreur ne se mesure pas au nombre de ceux qu’elle emprisonne. Je sens dans Manhattan l’odeur de la poudre, les corps morts autour des survivants et sur eux, je redécouvre avec eux mes blessures, je traverse cette interminable antichambre entre l’extrême violence subie et la prise de conscience hébétée de cette violence. C’est dans cette antichambre qu’il est aisé, je crois, de devenir fou.

Le choc est tel qu’il n’y a plus de réalité – ou alors, il n’y a plus que ça.

Une réalité atrocement pure, aussi peu comestible que le cacao à 100 %. Je n’ai pas besoin d’imaginer ce qu’ont vécu les blessés, ni ce qu’ils vont désormais, à l’hôpital et plus tard, devoir supporter, accepter, pour la plupart surmonter. Ils marcheront moins bien, auront la mâchoire difficile, les bras ou les mains handicapés. Cependant, tout albatros blessé qu’ils soient, ils recommenceront à voler vers des rêves fragiles mais renouvelés. Tout progrès et tout plaisir obtenus seront les résultats d’une grande, quoique petite, aventure. La survie mérite d’être vécue. Comme mes amis touchés et survivants de Charlie, je suis l’un d’eux.

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