En RD Congo, la danse « réveille l’âme » des réfugiés dans le camp d’Inke


© AAD | Atelier de danse organisé dans le camp de réfugiés d’Inke, en République démocratique du Congo.
En république démocratique du Congo, la danse « réveille l’âme » des réfugiés dans le camp d’Inke
Texte par Sarah LEDUC
09/05/2018
Dans le camp d’Inke, qui accueille dans le nord de la République démocratique du Congo près de 15 000 Centrafricains déplacés, un chorégraphe congolais fait danser les réfugiés. Une démarche artistique autant que thérapeutique.
« La danse, c’est le réveil de l’âme. » Fabrice Don de Dieu Bwabulamutima est persuadé du pouvoir de son art. Le chorégraphe congolais, originaire du Kivu, enseigne la danse dans des camps de réfugiés en République démocratique du Congo (RDC), à ceux qui ont connu la guerre, la violence, la migration forcée.
Fabrice est l’un des chorégraphes engagés de « Refugees on the move » (Réfugiés en mouvement), un programme lancé par le fonds privé français African Artists for Development (AAD), en partenariat avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), qui utilise la danse comme outil de médiation socioculturelle et de reconstruction psychologique. L’objectif est triple : réduire la violence au sein des camps de réfugiés, contribuer à restaurer l’estime de soi et accroître le dialogue entre les populations déplacées et locales.
C’est dans ce but que Fabrice a posé ses valises, avec sa compagnie « Kongo Drama », dans le camp d’Inke, en décembre 2017. Situé dans la province de Nord-Ubangi, au nord de la RDC, le camp accueille environ 15 000 réfugiés originaires de République centrafricaine, pays frontalier en proie, depuis 2013, à des affrontements violents entre groupes armés.
Ces conflits s’invitent parfois dans le camp mais ils sont rapidement évacués par la danse. « On travaille sur des valeurs que peut véhiculer la danse : le rapprochement, la persévérance, la beauté », explique par téléphone à France 24 Fabrice Don de Dieu Bwabulamutima. « Dans le camp, les chrétiens et les musulmans ne se parlaient pas. Mais, à travers des exercices, ils développent des idées ensemble. Ces ateliers permettent de rapprocher des gens que rien ne liait, voire qui étaient ennemis à l’extérieur », développe-t-il.
Et tandis que les conflits s’apaisent, les danseurs reprennent confiance en eux. « Petit à petit, on voit des sourires, des ports de tête se redresser, des regards se croiser… La danse offre un ‘mieux-être’. Leur âme revient dans leur corps et cela réveille un sentiment d’espoir. IIs peuvent à nouveau croire à un avenir », poursuit Fabrice Don de Dieu Bwabulamutima.

« Chorégraphe humanitaire »

Né en 1977 à Kamituga, dans le Sud-Kivu, région de la RDC au cœur de conflits armés depuis plus de vingt ans, Fabrice sait combien la danse peut-être salutaire. Il a toujours accompagné sa pratique artistique d’un engagement de terrain. Directeur artistique de l’Atelier theatr’Actions de 2001 à 2007, il a monté plusieurs spectacles de théâtre d’éducation sur le paludisme, le sida, l’hygiène dans le Kivu.
En 2015, Fabrice est sollicité par AAD. L’ONG avait lancé son programme « Refugees on the move » en 2011 au Tchad, pays qui comptait à l’époque plus de 300 000 réfugiés. Face à son succès, l’initiative a été reproduite en Centrafrique, au Burundi, au Burkina Faso et en RD Congo, à chaque fois portée par des artistes locaux. Formé par le chorégraphe burkinabè Salia Sanou, Fabrice s’est d’abord investi dans le camp de Mole, à la frontière de la RDC et de la Centrafrique, avant de poursuivre son travail à Inke.
« Nous sommes des chorégraphes humanitaires », explique Fabrice Don de Dieu Bwabulamutima. « Nous sommes des artistes mais nous avons la capacité de travailler avec un public en difficulté et à l’aider à se sentir mieux en trouvant une forme d’expression artistique ».

Des petits miracles artistiques

À Inke, les ateliers de Fabrice ont rapidement trouvé leurs adeptes : plus de 1 000 personnes se sont inscrites au départ et près de 500 se sont engagées pleinement. Après cinq mois de travail intensif, à raison de 5 heures de cours par jour, cinq jours par semaine, les participants réguliers – réfugiés et locaux – présentent le 10 mai, dans le camp, le spectacle « Étoile d’espoir », un mélange de danse africaine traditionnelle, contemporaine, de hip-hop et de musique.
« Les personnes qui suivent les ateliers sont là parce qu’elles le souhaitent. Elles sont engagées et ont suivi un rythme d’entraînement quasi professionnel. Quand les personnes se dépassent, on arrive à des miracles artistiquement parlant », se réjouit le chorégraphe.
« Ce projet est visionnaire et le résultat est spectaculaire par sa qualité. Il met en évidence toute l’énergie, la générosité du chorégraphe, de sa troupe et des danseurs », s’enthousiasme la chorégraphe et danseuse brésilienne, Marcia Barcellos, en visite dans le camp d’Inke. Fondatrice de la compagnie « Système Castafiore », Marcia Barcellos chorégraphiera un ballet avec Fabrice Don de Dieu Bwabulamutima pour les 70 ans de la déclaration des droits de l’Homme, en décembre 2018, au Palais de Chaillot, à Paris.

Pour joindre l’article, cliquez sur la photo

Les vioLences à L’égard des femmes demandeuses d’asile et réfugiées en France

Les vioLences à L’égard des femmes demandeuses d’asile et réfugiées en France

Une étude de France terre d’asile Les cahiers du social n°40 // Avril 2018
cette étude a été réalisée par :
Olga Bautista Cosa
Chercheuse experte en genre et violences basées sur le genre et Doctorante en socio-anthropologie de la Faculté de Sciences politiques et sociales de l ́Université Complutense de Madrid.
Sous la direction d’Hélène Soupios-David, chargée des questions européennes et des études à France terre d’asile
Cette étude a été réalisée dans le cadre du projet VIDA, « Violences à l’égard des femmes demandeuses d’asile et réfugiées en France », mené par France terre d’asile de septembre 2017 à avril 2018.
Le projet a reçu le soutien financier du Département d’État des États-Unis dans le cadre du « Julia Taft Fund ».
Bien que cette étude ait été financée par une subvention
du Département d’État des États-Unis, son contenu n’exprime et ne reflète pas nécessairement les opinions du Département d’État et / ou du gouvernement des États-Unis.


Photo de couverture : reproduction d’une œuvre de l’artiste iranienne en exil Hura Mirshekari. Les femmes et les violences qu’elles subissent sont une part importante de son œuvre.
Après avoir été hébergée au Cada de Créteil de France terre d’asile, Hura est désormais
en résidence à la Cité internationale des arts de Paris (2017-2018) dans le cadre
du programme d’accueil d’artistes réfugiés. Pour plus d’information : www.aa-e.org/fr/artiste/577 Conception graphique : Stéphane Bazin, bazinfolio.com
Impression : Encre Nous

Pour lire l’étude, cliquez sur la peinture de Hura Mirshekari