Le burn-out ça se traite… mais dans le privé


19 février 2018
Eva travaille dans un groupe privé, et plus précisément Directrice des ressources humaines. Depuis une quinzaine d’années. Et elle traite, entre autre, des problématiques liées aux risques psychosociaux. De fait, ça existe dans le privé. Elle a accepté de nous expliquer quelle était sa vision de la problématique. Et de quelle manière, avec un peu d’imagination, cela pourrait s’appliquer à la Police Nationale.

Les risques psychosociaux, qu’est-ce que c’est ?

Une simple recherche Google va donner des milliers de pages de résultats.
Aujourd’hui on prend conscience que risques psychosociaux et qualité de vie au travail sont deux sujets importants pour les entreprises.
Déjà, d’un point de vue légal, il y a l’obligation de l’employeur de protéger la santé physique et mentale et la sécurité des travailleurs (art. L.4121-1 du Code du Travail).
Ensuite d’un point de vue RSE (responsabilité sociétale des entreprises), il est important que les entreprises portent des valeurs de respect de chacun.
Enfin d’un point de vue purement pragmatique : le coût de ces sujets… c’est de l’argent pour les entreprises et aussi pour la société. Ils sont une partie importante de notre boulot en tant que RH… Même si cela peut paraître paradoxal, j’essaye autant que faire ce peut d’objectiver les choses. Je m’appuie sur des chiffres pour construire un plan d’action. Oui on parle de sujets comme risques psychosociaux et je réponds chiffres et plan d’action cela peut paraître étonnant. Mais mon métier c’est de mettre en place un cadre de travail sécurisé et développant pour les salariés. Mon premier regard quand je prends un nouveau périmètre c’est toujours de regarder les chiffres et pas les cas individuels… un turn over trop haut, un taux d’arrêts maladie trop haut sont autant de signaux. À partir de là on va faire des études de postes pour identifier les sources : je vais prendre un exemple simple j’ai pu traiter des populations à fortes astreintes et j’avais plus d’accidents de trajets : la mise en place de taxis ou vtc pour rentrer après ces astreintes a fait chuter ce taux… évidement cela a un coût mais compensé par la baisse des absences.

Pour en revenir au burn-out, au premier abord c’est un échec collectif, évidement d’abord humainement, mais pour l’organisation, cela veut dire que les signaux n’ont pas été identifiés (via les chiffres dont on a déjà parlé)… ensuite il y a le manager et la rh qui doivent être formés à détecter les changements dans les équipes : un surinvestissement, des horaires trop amples, des changements de comportements… il y a des outils et des relais : le manager, les collègues, les représentants du personnel…
À chaque relais il faut avoir des formations pour détecter ces situations.

Quelles mesures de prévention ? Et après, quel retour ?

On va faire de la sensibilisation, des formations, on va aussi former des équipes entières si on détecte que leur poste/métier est plus exposé à certains risques. Autre exemple pour des populations qui sont en relation avec de la clientèle et qui sont plus exposées aux conflits ou micro agression de mécontentement ; il faudra les former obligatoirement à la gestion de conflit par exemple… par des ateliers avec des collègues pour que le collaborateur ne se sente pas seul et qu’il relativise. Il va également s’agir d’éviter l’effet de halo, qui est un effet de contamination… pour faire simple : Si la première impression sur la personne est favorable, ce biais perceptif tend à interpréter favorablement ce que cette personne dit ou fait. C’est l’effet halo positif. À l’inverse, si la première impression est défavorable, ce biais perceptif tend à voir la personne sous un prisme négatif. C’est l’effet halo négatif. Cela peut s’appliquer à un service/métier, qui, donc, peut être contaminé… on va parler de spirale négative : le turn over va être important… les arrêts aussi… dans ces cas il faut “briser” la chaîne. Le coût est difficilement chiffrable mais en prenant des services au fonctionnement nominal on verra le différentiel.
Voilà pourquoi j’explique que mon métier est de regarder des chiffres… même si dans l’intitulé de mon poste il y a « humaine »…
• L’arrêt en lui-même : il doit donner le temps au salarié de se reconstruire… là c’est la place des médecins… avant de reprendre il y a une visite auprès de la médecine du travail, voir une visite de pré-reprise.
• la partie obligation légale (poste équivalent…) en la pratique, généralement, ces cas sont vu par des rh plus expérimentés et on co construit le retour. Il est évident qu’un retour réussi est un gain pour tout le monde, je m’explique évidemment humainement parlant c’est important mais en terme d’image tout le monde y trouve son compte… et cela évite l’effet de Halo négatif…

Question : Demain, tu es RH dans la Police Nationale ; comment interviendrais-tu ? quelles mesures pourrais-tu prendre ?
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Le policier en situation de burn-out, état des lieux 2/3

Jules a aujourd’hui un peu plus de trente ans. Il est dans la police nationale depuis maintenant une dizaine d’années. Après un début de carrière en tenue, puis dans un service d’investigation de petite couronne parisienne, il a opté pour la Police Judiciaire. Il était motivé, à fond dans son travail, comme le sont tous les policiers ou presque, et puis, sans qu’il ne s’en rende compte tout de suite, il s’est laissé dépassé, au cours de sa carrière, se mettant en danger. Heureusement, il a pu en faire le constat lui-même, et prendre le taureau par les cornes, pour s’en sortir, aller de l’avant, et retrouver l’envie, la motivation du premier jour. Je lui ai alors demandé de parler de son vécu, de la manière dont il voyait le burn-out, comment il l’avait vécu, et comment, idéalement, il pense que le sujet devrait être traité dans la police.

Nous avions déjà pu le lire ici. Je lui rends la plume :

https://blog.francetvinfo.fr/police/2018/02/18/le-policier-en-situation-de-burn-out-etat-des-lieux-23.html