Le soutien psychologique des victimes du terrorisme

Modalités et enjeux

par Carole Damiani

Psychologue – Aide aux Victimes – Chargée de mission à l’Inavem (Institut National d’Aide aux Victimes et de Médiation) Chargée de cours à l’Université Paris V 1 rue Pré St Gervais 93500 Pantin
carole.dam.at.voila.fr
Pages 173 – 185


LE SOUTIEN PSYCHOLOGIQUE AUX VICTIMES D’ATTENTATS TERRORISTES NOUS A AMENÉ À AMÉNAGER LE CADRE ET LA PRATIQUE THÉRAPEUTIQUE
La première adaptation nécessaire, concerne la demande du patient. Dans ce domaine de l’effraction, il est illusoire d’attendre une demande construite de la part du sujet, du moins dans un premier temps. Pour cette raison, sur manda t du procureur, les psychologues des services d’aide aux victimes prennent cette première initiative (sous forme de courrier ou d’information diffusé dans les médias). Ce n’est jamais une initiative privée, mais une proposition d’aide, dans un cadre institutionnel défini, qui laisse au sujet l’entière liberté de son choix. Avec l’expérience, il nous semble tout à fait clair que l’offre doit anticiper la demande et lui permettre ainsi d’émerger. L’intervention psychologique sera d’autant plus efficace qu’elle interviendra précocement et se situera au plus près du traumatisme. Il ne s’agit pas de “dédramatiser”, mais de lutter contre le massif sentiment d’abandon des victimes et de garantir, par une présence authentique, un espace de parole dans une indispensable continuité. Si les conditions du premier accueil sont satisfaisants, les répercussions psychologiques seront certainement moindres et meilleure sera la qualité du suivi éventuel.

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Enfin, il est fondamental de considérer le sens de la gratuité des actes thérapeutiques dans une association d’aide aux victimes. Certaines victimes considèrent la gratuité des entretiens psychologiques comme un assujettissement, d’autres la posent comme un dû. II importe de travailler pour que la victime se sente aussi responsable dans ses engagements et son parcours, et qu’une autre demande soit possible, sans remettre en cause le principe de la gratuité. Celui-ci rend difficile l’acceptation du paiement ultérieur d’autres professionnels : psychothérapeute ou avocat notamment.

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Topique
2003/2 (N°83)
Pages : 210
DOI : 10.3917/top.083.0173
Éditeur : L’Esprit du temps

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14 Juin 2016 – Victimes du terrorisme : Le suivi psychothérapique en question

Logo AlfestVICTIMES DU TERRORISME :
Le suivi psychothérapique en question

Colloque
Mardi 14 juin 2014

La prise en charge dans la durée des patients présentant des troubles psychiques consécutifs aux attentats de Paris en 2015 interroge notre clinique et notre pratique à la mesure du caractère inédit de la situation.
Nonobstant nos mécanismes de défense, force nous est de convenir de l’entrée dans une nouvelle ère d’une menace terroriste ubiquitaire et indéfinie dans sa durée.
Chacun s’arrange de cette situation dans la mesure de sa capacité de méconnaissance du risque.
Beaucoup n’ont rien changé dans leur mode de vie.
D’aucuns, en proie à une conscience plus vive du danger, restreignent leurs déplacements, évitent les transports en commun.
Les victimes des attentats souffrent, quant à elles, d’une forme de « lucidité aigüe » vis-à-vis du risque, une « lucidité exacerbée » peut-on dire si l’on veut concéder cette rationalisation de la menace.
Cette lucidité, qualifiable en tout cas d’inopportune, réalise une entrave non seulement à leurs déplacements mais aussi à une évolution clinique favorable.
Leur esprit est envahi de scénarii imaginaires d’attaques sanglantes dans toutes les situations de la vie publique.
La menace de mort ne s’arrête pas au seuil de leurs maisons.
Leur vie privée est effractée par la répétition traumatique.
C’est bien ce qui spécifie la situation actuelle que de nous placer sous l’influence d’une menace pérenne, une menace qui ne passe pas, indéfiniment actualisée.
Une des marques du traumatisme est de figer temporellement le sujet dans l’instant traumatique quelle que soit la distance prise avec la menace vitale.
Une visée de suivi psychothérapique est à contrario de conférer un statut de souvenir à ce passé traumatique qui refuse de passer.
Dans la situation actuelle comment prendre quelque distance avec ce trauma incessamment actualisé lorsque la menace, elle, ne cesse pas, insiste et resurgit dans sa concrétude ?
Pour les patients dont les coordonnées du traumatisme sont circonscrites à une situation, un passé, révolus, ce qui constituait jusqu’alors l’essentiel de notre pratique, il est courant d’observer un déclin des questionnements liés au trauma au profit de l’advenue au premier plan de la scène clinique d’une problématique personnelle.
Tel s’interroge sur sa position de sacrifice dans la relation à autrui ; pour un autre il apparaît que sa dynamique de vie était régie par une impossibilité de s’engager.
Dans une telle configuration, de l’instauration de ce travail sur soi et d’une distance de sécurité prise avec la menace de mort, la question traumatique, elle, s’estompe, se dilue.
Il n’en va pas ainsi pour les victimes des attentats de 2015.
Si, dans la prise en charge, une problématique singulière est le plus souvent dégagée, la répétition traumatique insiste avec son caractère bruyant, envahissant, intimement déstabilisant.
Le praticien doit faire face et tenir, sans faillir, dans la durée face à l’irruption inexorable de ce réel.
Il doit également tenir compte des nouvelles dispositions judiciaires et indemnitaires qui engagent le patient dans un parcours de procédures administratives et expertales qui ne sont pas sans influer, favorablement ou défavorablement, sur sa symptomatologie.
La pérennité de la menace de mort dans la réalité désempare les sujets psycho-traumatisés, non seulement en raison de la « perte d’illusion d’immortalité », mais aussi et surtout par la « perte de l’illusion de maîtrise », de maîtrise de la contingence, du hasard de la « mauvaise rencontre ».
Le risque est maîtrisable.
C’est un fait indubitable, particulièrement dans les circonstances qui sont les nôtres.

Jean-Philippe RONDIER


8 h 45

Accueil des participants et ouverture

Présidence : Humbert Boisseaux
9 h 00

Introduction

Carole Damiani

Etienne Vermeiren

La ministre , Carole Damiani, Humbert Boisseaux : ouverture colloque

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9 h 15

Bertrand Lahutte

(Psychiatre, Professeur agrégé du Val de grâce, Paris)  :
« Psychothérapie et terrorisme »
suivi psychothérapique

10 h 00

Virginie Vautier

(Psychiatre des armées, HIA Toulon.)
« Prise en charge familiale de victimes du terrorisme »

10 h 45

Pause-café

Présidence : Étienne Vermeiren (vice président de l’Alfest)
et Marc-Paul Sebastiao (trésorier de l’Alfest)

11 h 15

Jean-Jacques Chavagnat

(Psychiatre, Président de la Fédération Nationale Trauma)
suivi psychothérapique


14 h 00
Présidence et introduction :
Présidence : Carole Damiani

Etienne Vermeiren

(Psychologue clinicien, Cliniques Universitaires Saint Luc, Bruxelles) :
« Dispositif d’accueil et de prise en charge des victimes, impliqués et familles, lors des attentats de Bruxelles »
suivi psychothérapique

15 h 00

Anne Decung

(juriste, Paris Aide aux Victimes)
« Le parcours pénal et indemnitaire d’une victime de terrorisme »

16 h 00

Humbert Boisseaux

(Psychiatre, Professeur agrégé du Val de Grâce, Paris) & un magistrat
« Que vient dire un certificat ? ».

16 h 45
Synthèse
17 h 15
Informations diverses


 

Etienne Vermeiren expose le travail impressionnant réalisé à Bruxelles depuis les attentats
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