Traiter les troubles psychiques des migrants, un défi de taille

Traiter les troubles psychiques des migrants, un défi de taille
IMMIGRATION Une étude parue ce mardi se penche sur les troubles psychiques des migrants, dont le suivi se heurte à nombre de freins…
Oihana Gabriel
Publié le 05/09/17

• Une étude de Santé publique France paraît ce mardi sur les conditions sanitaires des migrants en France, notamment sur les troubles psychiques de cette population vulnérable.
• La prise en charge de ces problèmes psychiques se heurte à nombre de freins, au premier rang desquels le manque de moyens consacrés à cette question.
• Pourtant, le besoin de suivi psychologique s’avère primordial, car ces troubles psychiques peuvent entraîner des problèmes de mémoire, de la dépression, des idées suicidaires parmi les membres de cette population.

« C’est un enjeu de santé publique », assure Arnaud Veïsse, directeur du Comité pour la santé des exilés (Comede) et auteur de l’étude qui paraît ce mardi sur les troubles psychiques des migrants. L’occasion de se pencher sur une question peu évoquée quand on parle des migrants, et de constater à quel point les aider s’avère compliqué.

Le problème principal des migrants

Selon une étude* réalisée par le Comité pour la santé des exilés (Comede), qui paraît ce mardi au Bulletin épidémiologique hebdomadaire

« la prévalence globale des troubles psychiques graves s’élève à 16,6 % dans cette population. Ces troubles sont constitués pour les deux tiers de syndromes psychotraumatiques (60 %) et de traumas complexes (8 %). »

Plus d’un quart des patients (27 %) ont présenté des idées suicidaires et 7 % des patients se sont trouvés au moins une fois en situation d’urgence psychiatrique.

« Contrairement aux idées reçues, ce n’est ni la totalité ni la majorité des migrants qui relèvent d’une prise en charge spécialisée en santé mentale, nuance Arnaud Veïsse. Mais, en réalité, 16 % c’est beaucoup. On parle beaucoup du sida, de la tuberculose concernant les migrants. Si on compare les chiffres, le principal problème de santé de cette population, ce sont les syndromes psychologiques graves. »

Un cercle vicieux

Or, ces troubles handicapent leur intégration. En effet, les traumatismes peuvent diminuer

« leurs capacités à mettre en récit leur parcours d’exil devant l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d’asile »

souligne l’étude. Une étape pourtant décisive pour demander un statut de réfugié. Mettre en mots un passé émaillé de tortures ou violences sexuelles se heurte au déni, un mécanisme de défense courant.

« Le temps administratif n’est pas le temps psychique »

résume Sibel Agrali, directrice du centre de soin du centre Primo Levi, qui aide les victimes de torture.
Autre conséquence de ces traumatismes non traités : des problèmes de mémoire. Qui rendent plus difficile l’apprentissage du français. « Plus vite on arrive à faire en sorte que les personnes racontent, plus vite ils auront de la place dans leur tête pour apprendre de nouveaux codes, liens, langue, assure Sibel Agrali. Et plus on prend en amont les difficultés psychologiques, moins ils s’enkystent. D’autant que les effets des traumatismes sont transmissibles : le couple, les enfants sont impactés. Il y a des familles qui ne sortent pas des violences intrafamiliales, de la dépression, de l’alcoolisme. »

Extrême précarité

Mais ce travail psychologique se heurte à nombre de freins. Au premier rang desquels l’extrême précarité des migrants. Selon l’étude du Comede, 98 % des migrants interrogés n’avaient pas de logement personnel, 81 % étaient dépourvus de protection maladie, 23 % ne pouvaient pas manger à leur faim. « Difficile d’aller voir un psy quand on ne sait pas où on va dormir. Ils en ont envie, mais c’est le énième de leurs soucis, ils sont en mode survie », résume Sibel Agrali.
« C’est souvent une fois que les problèmes matériels sont réglés que la dépression arrive ou que les autres troubles psychiques ressurgissent », souligne Hanae El Bakkali, psychothérapeute au sein de Thot, une école diplômante de français pour migrants.

Des troubles psychiques lourds

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Common mental disorders in asylum seekers and refugees: umbrella review of prevalence and intervention studies

Common mental disorders in asylum seekers and refugees: umbrella review of prevalence and intervention studies
Received: 8 June 2017 – Accepted: 19 August 2017 – Published: 25 August 2017

  • Giulia TurriniEmail author,
  • Marianna Purgato,
  • Francesca Ballette,
  • Michela Nosè,
  • Giovanni Ostuzzi and
  • Corrado Barbui
Abstract

Background
In recent years there has been a progressive rise in the number of asylum seekers and refugees displaced from their country of origin, with significant social, economic, humanitarian and public health implications. In this population, up-to-date information on the rate and characteristics of mental health conditions, and on interventions that can be implemented once mental disorders have been identified, are needed. This umbrella review aims at systematically reviewing existing evidence on the prevalence of common mental disorders and on the efficacy of psychosocial and pharmacological interventions in adult and children asylum seekers and refugees resettled in low, middle and high income countries.
Methods
We conducted an umbrella review of systematic reviews summarizing data on the prevalence of common mental disorders and on the efficacy of psychosocial and pharmacological interventions in asylum seekers and/or refugees. Methodological quality of the included studies was assessed with the AMSTAR checklist.
Results
Thirteen reviews reported data on the prevalence of common mental disorders while fourteen reviews reported data on the efficacy of psychological or pharmacological interventions. Although there was substantial variability in prevalence rates, we found that depression and anxiety were at least as frequent as post-traumatic stress disorder, accounting for up to 40% of asylum seekers and refugees. In terms of psychosocial interventions, cognitive behavioral interventions, in particular narrative exposure therapy, were the most studied interventions with positive outcomes against inactive but not active comparators.
Conclusions
Current epidemiological data needs to be expanded with more rigorous studies focusing not only on post-traumatic stress disorder but also on depression, anxiety and other mental health conditions. In addition, new studies are urgently needed to assess the efficacy of psychosocial interventions when compared not only with no treatment but also each other. Despite current limitations, existing epidemiological and experimental data should be used to develop specific evidence-based guidelines, possibly by international independent organizations, such as the World Health Organization or the United Nations High Commission for Refugees. Guidelines should be applicable to different organizations of mental health care, including low and middle income countries as well as high income countries.

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