Dépression, burn-out : l’art-thérapie apaise les souffrances

Dépression, burn-out : l’art-thérapie apaise les souffrances
Le Parisien > Oise
17 mars 2014,
Chaque année, une centaine de personnes en détresse psychologique passent par l’atelier arts et thérapie de l’hôpital. Cette semaine, l’établissement vous ouvre ses portes.
Sous ses doigts plus ou moins experts et avec les conseils de l’artiste Kryst, ses personnages de glaise prennent peu à peu vie. Ce jeudi après-midi, dans l’atelier arts et thérapie du centre hospitalier interdépartemental (CHI) de Clermont, Delphine s’adonne à sa passion : la sculpture. Sur l’argile encore humide, la quadragénaire façonne les traits de son personnage.
Autour d’elle, ils sont une dizaine d’autres apprentis sculpteurs concentrés sur leur ébauche. Quelques rires échangés, des conseils prodigués… Ici, pas de médicaments ni de médecins. Seulement des pinceaux, des ciseaux, des couleurs… Difficile d’imaginer qu’il s’agit pourtant bel et bien d’un atelier thérapeutique. Car ici, on ne donne pas seulement forme à sa créativité, on se soigne aussi. « En réalisant quelque chose de soi, la personne se sent valorisée. C’est un moyen, un outil pour dépasser son mal-être. S’exprimer, c’est se libérer », confirme le docteur Jean-Philippe Catonné, responsable du service arts et thérapie, créé en 2001 au CHI.

Salariés en burn-out, patrons en dépression, parents épuisés, malades du cancer ou patients atteints de troubles psychiques sévères… Chaque année, plus d’une centaine d’hommes et de femmes de tous âges, venus de tout le département, passent par cette unité. Il y a cinq ans, ils n’étaient encore qu’une cinquantaine. « Pour participer, il n’y a pas de prérequis en arts ! Il suffit de venir avec une prescription de son médecin ou de son psychiatre », précise le médecin. Peinture, théâtre, dessin, écriture… Plus d’une dizaine d’activités différentes, toutes assurées par des artistes, sont ainsi proposées.

Delphine a opté pour la sculpture, qu’elle a découverte en région parisienne. « Après une dépression, je me suis repliée sur moi-même. Je ne parlais plus et n’avais plus de vie sociale. J’ai mis le temps mais, peu à peu, j’ai repris confiance et me suis ouverte sur le monde », témoigne-t-elle.

Au fil de leurs créations, ces « patients » évacuent leur blues, réapprennent l’estime de soi, à supporter le regard des autres. « L’avantage, ici, c’est qu’on n’est pas jugés : on a tous des problèmes. Il n’y a donc pas de tabou », estime Catherine, 55 ans. Voilà six ans qu’elle participe à l’atelier et, malgré un déménagement à Paris, elle est présente tous les jeudis à Clermont.

Car, au-delà de l’expression artistique, l’unité leur permet de rompre leur isolement. Catherine, elle, y a trouvé des amis. « Autrefois, j’étais seule. Aujourd’hui, je ne le suis plus. »

CHI, 2, rue des Finets, à Clermont. Contact : 03.44.75.65.87/88.

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Suicide de policiers – « Des traces psychologiques considérables »

Suicide de policiers : « Ne pas avouer sa faiblesse, même passagère »
par Mounir Belhidaoui
5 janvier 2018
Les policiers, eux aussi, ont le blues. En deux ans le suicide de membres de forces de l’ordre a significativement augmenté. Pourquoi ? Quelques éléments de réponse.
Le 31 décembre 2017, dans la petite commune de Champigny-sur-Marne (94), des heurts entre vigiles, policiers et jeunes ont éclaté en marge d’une soirée organisée dans une salle de la ville. Deux policiers, Laurie et Dominique, arrivés en plein milieu d’une scène de quasi-émeute, furent roués de coups par une bande de jeunes. Ils ont pu être tirés d’affaire par Ali, un garçon de 17 ans. Les deux fonctionnaires se sont vus prescrire respectivement 7 et 10 jours d’incapacité totale de travail (ITT). La soirée n’avait été autorisée ni par la Mairie, ni par la Préfecture.

« Des traces psychologiques considérables »

« Le problème, c’est l’anticipation de l’événement », confie Jules*, un membre du collectif Citoyens et Policiers, qui veut installer du liant et de la confiance entre les personnes et les forces de l’ordre. « Une soirée rassemblant 800 personnes un soir de 31 décembre (moment à risque annuel pour les policiers) aurait dû alerter les autorités. Une solution adaptée aurait dû être décidée en amont ». Cette agression de policiers pose la question de leur condition de travail, et notamment leur formation, « insuffisante ». « Aucune formation à la gestion du stress ou encore à la désescalade des situations violentes » selon Jules*, membre du collectif depuis bientôt deux ans.
Nous comprenons que cette question est intimement liée à celle de la pression que vivent les policiers au quotidien, qui les placent dans des situations de plus en plus insoutenables. Sur la seule année 2017, ce sont près de 40 policiers qui ont mis fin à leurs jours, soit trois fois plus que sur toute l’année 2016. « Les raisons sont à mon sens multifactorielles mais jusqu’à présent, elles ont toujours été caricaturées en « C’est un problème familial » », nous confie Jules* qui nous en dit plus sur la « difficulté du métier : insultes, menaces, violences, interventions sur des morts violentes, accidents de la route, vision du sang, des cadavres, etc… Ça laisse des traces psychologiques considérables, il n’y a aucun accompagnement dans ce cadre suite à tous ces événements ».

« La vie privée peut s’en trouver très impactée »

Le membre du collectif déplore aussi que la police « est un milieu machiste où il faut savoir se montrer fort et ne surtout pas avouer sa faiblesse, même passagère… Cela n’aide pas au dialogue, ça pousse même à l’isolement, voire au drame ».

Pour Loïc Fanouillère, secrétaire général du syndicat Alliance, l’un des plus puissants du métier, cette tendance est surtout liée à la « pression » que vivent les policiers, qui a « connu un pic au moment des attentats » : « sur le coup, la tension est très vive. Quand ça se calme un tout petit peu, les conséquences arrivent assez nettement ». Loïc Fanouillère ajoute des « problèmes de management » à « ne pas généraliser » : « La vie privée peut s’en trouver très impactée, l’intensité de l’emploi est vectrice de fragilité chez certains policiers ». La mise en place d’une cellule psychologique peut-elle être efficace en guise de solution ?
Dans une interview pour la radio RTL, Isabelle Venot, psychologue et chef adjointe du SSPO (Service de soutien psychologique opérationnel), répond, comme Jules*, que cela peut aider. Problème : les policiers y sont récalcitrants. « Il y a encore cette représentation d’homme fort qui tient la route » et « la représentation du psychologue de celui chez qui on va quand on est fou », argumente-t-elle. Les intervenants de ce papier explicatif sont tous d’accord pour dire que l’accompagnement est essentiel pour éviter de nouveaux drames, chez les civils comme chez les policiers, et que doit se rétablir un dialogue quelque peu perdu par la tension de l’époque.

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