Sophie G. – SoF – Le bon côté des choses…

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Comment avez-vous procédé pour la concrétisation de votre esquisse ?

Selon la consigne d’Alice Albertini – Création scripturale
Écrivez sur une situation présente qui n’est pas facile. Levez-vous et secouez-vous.

Ce jour-là, j’avais tout préparé selon mes habitudes désormais bien ancrées et j’étais même en avance sur l’horaire. C’est donc, très fière de moi et avec un large sourire, que j’attendais de voir apparaître Emmanuelle mon art-thérapeute à l’écran. Je souris justement en écrivant cela car c’est le terme qu’une de mes patientes, qui souffre de bipolarité utilise quand elle parle de moi : « Je suis « son » art-thérapeute. Donc quand je lui rends visite à l’hôpital où elle séjourne régulièrement, au moment où je m’en vais, elle prévient toutes les infirmières que l’on croise : « Je raccompagne mon art-thérapeute à la porte ! ». C’est à la fois très rassurant surtout si on se positionne par rapport au transfert, mais en même temps je me pose parfois la question : Est-elle consciente que d’autres patients m’attendent ailleurs ? (Depuis j’ai eu ma réponse… positive !).

Tout ça pour dire ou expliquer encore une fois, combien ces séances avec Emmanuelle sont importantes pour moi et à bien des niveaux, car là, en attendant qu’elle apparaisse comme par enchantement à l’écran, je prends totalement conscience de ce que ressentent mes patients en m’attendant. Cela s’opère à des échelles différentes, c’est sûr, mais si le transfert s’est réellement mis en place, la situation doit être sensiblement la même. A l’image de Max ce jeune patient, un adolescent de 13 ans, que je reçois dans ma pièce-atelier à la maison et qui Dimanche dernier alors qu’il faisait une randonnée-vélo avec ses parents, non loin de la maison a insisté avec véhémence pour me rendre visite ! Quand les parents me racontent de telles anecdotes, cela me comble de bonheur. Je parviens même à me dire : « Je suis bel et bien art-thérapeute ».

Je vous imagine, me lisant sur votre écran et en questionnement ?!? Où est la situation difficile ?!?  Nous serions presque chez les Bisounours là. Je vous l’accorde.

Il y a un côté difficile à tout ça, croyez-moi… Et c’est « LE CADRE ».

Je suis obnubilée par le cadre. Pourquoi ? parce que ce fichu cadre m’a joué bien des tours et à plusieurs reprises, dans maintes et maintes situations. Encore aujourd’hui, je dois faire des efforts inconsidérés pour veiller à son existence et son maintien.

Il est vrai que travaillant avec certains patients relevant de la psychiatrie, je dois forcément y veiller, bien plus que d’autres. J’en ai largement discuté avec ma professeure de psychopathologie devenue ma superviseure professionnelle. C’est compliqué de le faire comprendre aux autres thérapeutes qui ne côtoient pas les mêmes patients et qui traduisent votre attitude comme un surcroît de contrôle, finissant tout simplement par vous accuser d’être trop rigide. Et parfois tout cela est bien lourd à porter…

Alors quand Emmanuelle m’a demandé d’écrire sur une situation difficile ! Je ne me suis pas fait prier. J’adore écrire, surtout au stylo plume. Je les collectionne au point d’en avoir un pour chaque tâche de manière à pouvoir en utiliser un maximum. Il y a même eu celui qui n’a servi qu’aux brouillons des devoirs, le spécial « notes relatives au mémoire », celui de l’agenda posé sur le micro-onde. La couleur de l’encre est toujours la même : le bleu nuit. J’ai bien essayé de changer et prétextant l’excuse d’en avoir plus sous la main mais cela n’a pas marché…

Mais quel est le lien entre le cadre et la COVID-19 me direz-vous ? j’y viens…

Ce cadre existe, même deux fois, dix fois plus… A travers le plexiglas (j’avais commencé par mettre deux « s » à Plexiglas : Lapsus scriptural révélateur hum-hum …) sur mon comptoir, les très bons clients qui me faisaient la bise et que je dois tenir à 1 mètre (le scotch au sol, jaune et noir, semble invisible !), le masque que personne ne porte ou en montrant avec perte et fracas un mécontentement déjà évident de toutes façons, le gel hydroalcoolique qui se répand plus au sol que sur les mains, la cliente de ce matin qui se servait dans la vitrine des beaux stylos sans attendre que je m’en charge !

Au magasin nous aurions de quoi écrire un livre… Mais le soir c’est réellement exténuées que nous rejoignons nos foyers dans l’espoir d’avoir tenue « ce cadre » au mieux, pour ne rien ramener qui puisse nous faire regretter d’avoir eu l’espace d’un instant une mini-dose de nonchalance avec des répercussions catastrophiques. Cette période de dé-confinement au cadre tellement flou et incertain est un enfer pour moi et me plonge dans un désarroi profond ! Parfois j’ai envie de hurler. Alors je pense à mon escape sécurisant…

Donc j’ai écrit, écrit et encore écrit, pour m’en imprégner, pour le rendre physique ! J’ai même pris un feutre pour écrire en rouge. Le rouge est la couleur de la colère, de l’interdiction. Me parler du cadre me fait un peu sortir de mes rouages ! j’ai le sentiment que toutes les personnes qui m’entourent dépassent les bornes. Ou serait-ce moi qui ne sait toujours pas poser ce cadre ?!? Je vois rouge.

Ensuite Emmanuelle m’a demandé de me lever et de me secouer pour évacuer les mauvais sentiments, les humeurs et tout ce rouge… et il y en avait. Petit exercice bienvenu et nécessaire après ce moment d’écriture.

De cette situation que puis-je tirer de beau ? Qu’est-ce qui pourrait être, l’utile de cet apprentissage de la Covid-19 ? Entourez les mots qui ressortent le plus, qui résonnent pour vous.

Il me fallait à présent faire ressortir le « bon » de cette situation. Réfléchir aux apprentissages et à leurs conséquences, faire apparaître les mots positifs et forts au milieu de cette page d’écriture, ceux qui résonnent et font en sorte que tout cela devienne formateur. Car c’est bien le cas : être finalement obligée de poser ce cadre en permanence et de manière quasiment récurrente me donne à chaque fois un peu plus confiance en moi. J’apprends à m’imposer. Je réalise que le client que j’ai sermonné revient un jour ou l’autre, que le patient auprès duquel j’ai redéfini le cadre m’accorde à chaque nouvelle séance un peu plus sa confiance. Ils n’ont évidemment pas tardé à apparaître ces mots, car ils sont bel et bien présents et en permanence mais prise dans le tourbillon de cette vie qui a repris de plus belle avec le dé-confinement, je les oublie… Ou je n’ose pas passer le petit coup de fil, envoyer le petit mail ou le petit texto tout simplement qui me rattacheraient au wagon de la sérénité auprès de « mon art-thérapeute ».

Création picturale

A partir des mots entourés, faites-les grandir visuellement. Intégrer les mots dans la création visuelle sur une nouvelle feuille.

J’ai alors pu dessiner ce cadre tout autour de ma feuille pour le faire exister dans un ultime effort, le rendre physique pour moi si ce n’est pas possible pour les autres. A l’aide de l’aquarelle, mon médium favori en ce moment, j’ai dilué, dilué, dilué ma colère, pour ne faire ressortir que les mots positifs : Mes outils que sont mes connaissances, ma formation, et ma soif d’apprendre toujours plus grande, mes guides, Emmanuelle, Jean-Louis et Stéphanie (C’est amusant comme chacun a eu un rôle bien déterminant à vivre tout au long de mon cheminement !). Je les appelle affectueusement mes personnes ressources, et ils comptent tellement pour moi que j’ai décidé de les présenter sur ma page dédiée à l’art-thérapie. Ils ne doivent pas continuer à rester dans l’ombre.

Transformer le texte à partir de ce qui ressort de l’image

Reprenez la page d’écrits et imaginez que la page vous parle :  Je suis celle qui…. En regardant votre image.

Si cette image avait quelque chose à me raconter ? Que me dirait-elle ? Surtout aujourd’hui avec les récents événements ?!?…

Elle me dirait tout simplement de continuer sur ce chemin qui est le mien, que je suis sur la bonne voie. Elle me dirait aussi de ne jamais oublier que mes guides sont à mes côtés, prêts à m’aider à m’accomplir, me transformer, m’enraciner dans ce nouveau positionnement qui est le mien, celui d’une art-thérapeute en devenir. J’ai semé de nouvelles graines il y a maintenant quatre années, je dois maintenant veiller chaque jour à ce qu’elles fleurissent, s’épanouissent et deviennent chaque jour plus grandes, plus florissantes et vigoureuses à l’image de mon carré de jardin sécurisant. Elle me dirait aussi qu’il est grand temps d’être celle qui doit désormais se faire confiance, car elle a tous les outils en mains et ses guides-ressources à ses côtés pour y parvenir.

Elle me dirait aussi d’oublier ceux, celles qui n’en valent pas la peine…

Quels matériaux avez-vous utilisés ?

Toujours fidèle à moi-même et parce qu’il était en premier lieu question de diluer la colère, l’aquarelle prenait encore plus tout son sens. Les feutres Tombow venant souligner les mots intenses quand cela était nécessaire. Ils ont pu rester visibles et présents. Comme l’eau était pas mal présente, le papier 300grs a été lui aussi le bienvenu.

Que ressentez-vous en regardant votre production ?

Sur l’instant je n’ai pas trouvé cette production « émotionnellement présente », et puis en écrivant mon billet, une idée m’est venue. Je vais coller une photo de chacun de mes guides, et ressources. Et là… Je pense qu’elle sera plus aboutie !

Production à suivre… Aussitôt dit, aussitôt fait, j’ai fouillé dans mes archives et trouvé des images qui me convenaient. Une petite séance de collage a suivi.

Une phrase viendra clôturer le tout :

« Lorsqu’une porte se ferme, c’est qu’une autre s’ouvre » M. Graham Bell.

Sophie G. – SoF – Donner à soi et aux autres…

Sophie G. – SoF – Donner à soi et aux autres...
Comment avez-vous procédé pour la concrétisation de votre esquisse ?

Ce Lundi, le petit grain de sable était toujours présent ! j’avais bien tenté et réussi à être en avance sur l’horaire mais malgré cela, cette fois c’était l’écran de la plateforme qui restait noir… C’est quand même incroyable, d’autant que j’attends ces rendez-vous avec grand intérêt et motivation. Je songe même à laisser mon ordinateur allumé la semaine prochaine pour parer à toute éventualité. Heureusement, Emmanuelle l’art-thérapeute est non seulement d’une grande patience mais traite aussi cela avec humour en m’assurant que c’est un des travers des art-thérapeutes (sans doute mon « côté artiste ») ! Comme chaque semaine nous commençons par échanger sur les récents événements d’abord personnels puis liés à la COVID-19 et aux répercussions que nous avons encore à vivre. Je reste toujours très surprise de l’individualisme qui règne autour de moi, et je peux même dire que j’en souffre quotidiennement dès que je me retrouve dans des lieux publics où malheureusement il nous faut bien nous rendre de temps en temps. Je dirais même mieux : Quand on ne peut plus faire autrement… Je pense tout particulièrement au travail. Mais l’art-thérapie me permet quand je la pratique avec mes patients de compenser cela, et je donne alors sans compter. Parfois même jusqu’à me mettre en danger niveau fatigue d’ailleurs…

Aujourd’hui, c’est une consigne d’Alice Albertini, qu’Emmanuelle me propose de mettre en pratique. Une consigne au titre « Ô combien évocateur » : Donner à soi et aux autres… Donner aux autres, il n’y a pas de problème, je sais faire… Mais me donner à moi ?!? C’est une toute autre histoire…

Je dois donc commencer par plier une grande feuille en deux pour dessiner ensuite la moitié d’un cœur sur une moitié qui devra par la suite faire miroir avec l’autre moitié. Puis je le découpe. Avec le matériel que j’ai choisi au préalable et sur le côté que je souhaite, gauche ou droit peu importe, Emmanuelle m’invite à me poser une première question :

De quoi avez-vous besoin ?

Autrement dit, représenter ce dont j’ai besoin en ce moment ? Je dois confier qu’à ce moment précis ce qui me vient à l’esprit n’est pas très réjouissant, et l’environnement tel qu’il est actuellement me donne plutôt envie de me retrancher dans mes livres, l’écriture, la musique et mon jardin ou aux côtés de mes personnes ressources que j’ai la chance d’avoir dans mon entourage. Tout le monde n’a pas ce privilège, j’en suis consciente. C’est ce besoin que j’ai voulu retranscrire sur ce cœur. Même quand je pense à mon travail au magasin, qui en ce moment du fait de la faible fréquentation n’est vraiment pas sensationnel, mes idées sont presque tristes, et ma moitié de cœur l’est aussi.

Ensuite, Emmanuelle me propose de passer à la partie miroir que j’avais gardée pliée de manière à ne pas être influencée par la composition précédente, (et le moins que l’on puisse dire, c’est que çà n’a pas été le cas…). La deuxième question est :

Que pouvez-vous donner ?

Qu’avez-vous à offrir aux autres ? Comment pouvez-vous contribuer ? Avec toujours le même mouvement, si rien ne vous vient en tête, laissez-vous aller à la création et quelque chose apparaîtra.

Tout s’est alors passé très rapidement. Les idées et les couleurs fusaient. Tout était plus fluide pour moi, plus doux et harmonieux sans que je ne m’en aperçoive forcément au début. En même temps que mon dessin prenait forme, je m’expliquais sur les raisons qui m’animaient. Écoute, empathie, « bientraitance » à la place de bienveillance (ce mot si branché, si proclamé et si peu respecté à la fois…), prendre soin de… Tous ces mots qui évoquent pour moi ce que j’ai à offrir à mes patients, se retrouvaient sur cette moitié de cœur aux côtés d’une horloge sans chiffres symbole d’un temps illimité à donner. Et pour finir mes humbles compétences artistiques et connaissances à partager.

Quels matériaux avez-vous utilisés ?

Je prépare toujours les mêmes outils pour les ateliers passés avec Emmanuelle. Cela fait partie pour moi du rituel de ces moments privilégiés. Tout est à chaque fois placé au fur et à mesure au même endroit sur la table, et sur les meubles à proximité de manière que je puisse éviter de me lever. Priorité au processus de création ! Papier aquarelle 300 grs pour supporter toutes les techniques et les passages répétitifs du pinceau si nécessaire, craies aquarellables à la cire de chez Faber Castell, et feutres noirs Micron pour surligner ou écrire si besoin est… Et pour finir des pastilles de gouache aquarellables de la marque Faber Castell, trouvées au rayon scolaire, et cependant dotées d’une texture, et d’une texture incomparables. Parfois, il n’est pas nécessaire de posséder des outils luxueux pour éprouver du plaisir dans la création !

Une fois le cœur déplié, il m’a fallu trouver les similitudes entre les deux parties et rajouter une touche qui pourrait harmoniser un peu les deux parties. Il s’agissait alors de rendre la communication meilleure visuellement, de manière spontanée sans trop réfléchir, dans le seul but de laisser émerger les résonances.

Je ne voyais évidemment aucun inconvénient à la consigne, mais au premier regard rien, absolument rien ne les reliait. Un côté était sombre et triste à mes yeux et l’autre respirait la légèreté et la plénitude. Enfin c’est comme ça que je les ressentais, et c’est ce qu’Emmanuelle avait repréré bien avant moi … D’un côté le travail qui ne m’apporte rien en ce moment, et son lot d’aspects négatifs liés à la COVID-19 et ses répercussions, alors qu’au long de ces dernières années j’ai pris avec plaisir l’habitude de nourrir mon esprit à chaque instant via la formation, et de l’autre cette nouvelle vie au contact des patients. Une vie qui m’apporte tant et tant, à commencer par ces échanges avec mes personnes ressources qui m’aident tant face aux écueils que peuvent apporter de nouvelles problématiques. J’aime apprendre au contact des patients puis de mes guides. Pour harmoniser les deux parties, j’ai finalement opté pour les couleurs liées à la nature. Et c’est tout « naturellement » que les tons de vert sont venus s’installer de part et d’autre de ce cœur bien parti au départ…

Qu’avez-vous ressenti tout au long de l’évolution de votre création ?

Autant la première partie de ce cœur aura été laborieuse, autant la face miroir aura été fluide, et symbole d’harmonie tout au long de sa réalisation. D’un côté les difficultés, de l’autre, l’accomplissement et tout ce qu’il procure comme satisfaction et harmonie. Et même si cette création a débuté dans la difficulté, c’est sur un sentiment de satisfaction qu’elle me laisse.

Que ressentez-vous en regardant votre production ?

Ce n’est pas ma production préférée parce que mon regard tombe inexorablement sur ce côté si tristounet, mais en même temps, il me rappelle à l’ordre sur le fait que je dois continuer à travailler dur pour trouver une solution qui me permettra de m’adonner à plein temps à ma pratique de l’art-thérapie. Un travail de fourmi certes mais tellement enrichissant et chaque jour un peu plus formateur, porteur de nouvelles rencontres : le seul qui pourra m’aider à oublier ce satané virus qui lui, ne semble pas près de nous oublier !