Flavie Flament veut repousser la prescription en cas d’amnésie traumatique

mercredi 31/01/2018
La délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale a auditionné mercredi Flavie Flament dans le cadre de ses travaux sur le viol. L’animatrice, qui a publié en 2016 un livre où elle raconte avoir été violée à 13 ans, se bat pour obtenir l’allongement du délai de prescription des crimes sexuels sur mineurs.
Les députées Marie-Pierre Rixain (LREM) et Sophie Auconie (UDI, Agir et Indépendants) mènent une mission parlementaire sur le viol depuis plusieurs semaines. Elles auditionnent mercredi l’animatrice télévision et radio Flavie Flament et le magistrat Jacques Calmettes, magistrat honoraire, ancien président de l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation.
Dans « La Consolation » (JC Lattès, 2016), Flavie Flament raconte avoir été violée à 13 ans par le photographe David Hamilton. Mais ce n’est que beaucoup plus tard que le souvenir de ce drame lui revint, en consultant un album photo où elle s’est revue enfant. Un phénomène classique chez les victimes de viol dont la mémoire ne revient parfois que par flashs, et que la science arrive de mieux en mieux à cerner.

Les juristes estiment que plus de trente ans après les faits, le manque de preuves et de témoignages constitue un obstacle majeur, qui rendrait les plaintes caduques…
Si nous proposons aujourd’hui de porter le délai de vingt à trente ans après la majorité de la victime, c’est aussi parce que dans le futur, avec l’informatique notamment, les preuves seront mieux conservées. Mais dans bien des cas, notamment dans mon affaire qui a fait ressurgir une dizaine de témoignages qui montraient, à des époques différentes, un même modus operandi, rien ne dit que l’affaire n’aurait pas débouché sur un procès (NDLR : David Hamilton s’est suicidé après ses révélations) ! Le risque d’une impasse judiciaire existera toujours, mais, si les victimes sont accompagnées, elles décideront de le courir en toute connaissance de cause.


Pourquoi l’#amnésietraumatique a-t-elle été « exclue » du rapport Calmettes-Flament ?

M. Calmettes : « cette base de révélations (…) et les données acquises de la science ne permettent pas d’asseoir une procédure ».

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L’inceste, la prescription et la « mémoire traumatique » par le Docteur Nicole Poulbère

Mercredi 17 mars 2010
Docteur Nicole Poulbère, médecin urgentiste.
Comment vivre, victime d’inceste, sans pouvoir faire condamner le coupable du fait de la prescription ?
Il s’agit alors le plus souvent d’un mode de « survie » et non de « vie ». Bon nombres de femmes actuellement souhaitent se libérer d’un lourd fardeau passé : elles ont subi des agressions sexuelles par un proche de leur famille. Elles sont enfin décidées pour saisir la justice. Elles en ont enfin la force morale et physique. Mais là, elles se heurtent à un obstacle : la notion de prescription.
Toutes les femmes qui ont subi des sévices avant 2004, se devaient de faire un recours judiciaire avant leurs 28 ans (voir même avant leurs 21 ans si les faits sont plus anciens). Pour aider à se relever, à se reconstruire, ces femmes ont besoin que le coupable doit désigner comme tel par un représentant de la Justice. A la différence de plusieurs pays (comme le Canada), ces femmes resteront sans pouvoir être davantage soulagées de leurs maux. Au contraire, elles se sentent trahies, également victime du système juridique qui semble ainsi à leurs yeux cautionner les méfaits subits.
Mais alors pourquoi ces femmes ne se sont pas manifestées AVANT le fatal délai de la prescription ?
Ce n’est pas un manque de volonté mais un manque de capacités. Ces femmes voudraient que leurs souffrances morales persistantes cessent enfin. Elles ne souhaitent que cela ! Mais cela implique entre autres la reconnaissance en tant que victime.
A tout cela, vient se surajouter un phénomène décrit comme la « mémoire traumatique ». Il s’agit d’un mécanisme d’auto défense où le cerveau modifie les perceptions, où des amnésies des actes passés surviennent. Cela permet à la victime d’essayer de continuer à mener une vie d’apparence normale. Ce moyen de défense cérébral est vital. S’il fait défaut, la victime trouvera souvent comme autre issue le suicide.
Aujourd’hui, trop de femmes sont dans l’incapacité de voir condamner le bourreau qui les a mutilées physiquement et anéanties moralement à vie. Pourquoi ? Car la prescription les empêche d’avoir gain de cause en France. Pourtant, si elles ne se sont pas manifestées lors des faits ou sitôt après c’est pour survivre à ce phénomène destructeur. Elles ont cherché à « vivre avec », en enfouissant cela au plus profond d’elles même mais ce cancer qui les ronge reste là, en suspend. Par la suite, leur parcours de vie respectif voit souvent raviver le passé lors d’un évènement (mariage, décès, naissance…). La résurgence alors de ce passé va les détruire de nouveau, avec des dommages collatéraux imprévus (époux, enfants). Une prise en charge médicale s’avère indispensable le plus souvent du fait des risques de passage à l’acte.
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