6/ Inceste pas nommer par le législateur par Dominique Vrignaud dans De L’inceste

Les comptes de l’inceste ordinaire

Dominique Vrignaud

Juge pour enfants au Tribunal de grande instance de Lille

Page 141

En refusant de nommer l’inceste, le législateur laisse au juge le soin de faire coller l’ordre juridique à l’ordre moral et culturel.

De fait, une pénétration sexuelle commise par le père sur sa fille mineure n’est constitutive de viol qu’en cas de menace, contrainte, violence ou surprise. En l’absence de ces circonstances, seule l’atteinte sexuelle pourrait être constituée.

Faut-il que le juge se prononce sur la contrainte que constituerait la relation affective, éducative, sociale et matérielle existant entre le père et sa fille, pour poursuivre et sanctionner du chef de viol ?

De même, la répression liée à la seule ascendance (en termes d’emprise) de l’auteur sur le mineur ou sur le majeur ne prend pas en compte la notion d’inceste dans le cas d’agressions sexuelles commises par le descendant sur l’ascendant victime.

Si, comme nous l’avons vu, le législateur s’est refusé à gérer l’ordre moral et culturel et à s’immiscer dans le fonctionnement familial, néanmoins son intrusion s’est au fil des ans considérablement accentuée.

C’est d’ailleurs souvent au nom de l’enfant et de son intérêt que cette intrusion s’est opérée. En ma qualité de juge des enfants, ce serait ignorer la nature de ma fonction que de l’oublier, dans la mesure où celle-ci trouve son essence dans le contrôle même des conditions d’éducation faites à l’enfant par le ou les détenteurs de l’autorité parentale.

Sans entrer dans une description fastidieuse de la fonction de juge des enfants, il me paraît important, pour mieux appréhender comment la justice, et notamment celle des mineurs, peut intervenir dans l’inceste, de souligner que le juge des enfants, ainsi que l’enfant lui-même, se trouvent à l’interface du droit pénal et du droit civil.

En effet, le juge des enfants n’intervient pas en raison de l’existence de relations sexuelles entre l’enfant et un membre de son entourage, ou encore d’une atteinte à son intégrité, mais en raison d’un postulat non énoncé de façon claire ou légale : la situation incestueuse à laquelle est confronté l’enfant ou dans laquelle il est impliqué, constitue un danger grave, réel et certain pour son développement. Le juge des enfants trouve de fait sa compétence, selon les articles 375 et suivants du code civil, dans le champ de l’exercice de l’autorité parentale au cas où ce dernier ne serait pas de nature à permettre un développement ou une évolution de l’enfant conformes à l’intérêt et aux droits de celui-ci.

Saisi le plus souvent par le procureur de la République au nom de la notion de danger, il appartient tout d’abord au juge des enfants de localiser dans le temps et l’espace ce danger, puis de mettre en œuvre, si nécessaire, dans le champ de l’autorité parentale, les mesures adaptées. Les décisions qu’il prend au cours de la procédure sont donc à la fois des sanctions négatives (ce qui se passe est insupportable, dangereux pour l’enfant, vous ne pouvez faire cela, etc.), et positives (il y a eu des changements, ce que vous faites est conforme au droit de votre enfant, etc.). La justice des enfants, en matière d’assistance éducative, reste fondamentalement une justice négociée, une justice dynamique (en ce qu’elle prend en compte le temps et le changement), et une justice réparatrice.

Cependant, le législateur n’ayant jamais indiqué ou signifié quels étaient les éléments caractérisant le danger, les abus sexuels ne sont constitutifs de danger qu’au travers d’une construction jurisprudentielle issue de l’état de la société à un moment donné et des sciences de l’enfant au même moment.

Je voudrais, au travers de quelques cas, montrer la gravité des risques existants, exposer quelques caractéristiques de ces situations, mais également aborder la nécessité, face à un problème nouveau, d’inventer de nouvelles réponses judiciaires.

La situation incestueuse à laquelle est confronté un enfant est-elle synonyme de danger au sens juridique du terme?

Avant de répondre directement à cette question, il faut être convaincu qu’il est nécessaire et parfois suffisant de la poser. Force est pourtant de constater – et ce de manière fréquente – que tous les professionnels émettent de grandes réticentes à se la poser.

Combien de fois la famille n’a-t-elle pas été un agent absolutoire ou banalisateur du crime ou du délit commis ?

L’opinion publique, par exemple, ne s’émeut jamais vraiment des cas d’enfants tués ou violés en famille… « Peut -être, comme l’écrit Van Marcke, le tabou de l’inceste est-il pour notre culture et notre société à la fois une menace et une confirmation de leurs fondements. Étant les agents de notre culture, nous condamnerons l’inceste et du même coup nous tenterons de réparer ces fondements : la famille, notre famille. »

De même, combien de fois n’entend-on pas tel ou tel exprimer ses réticences sur les conséquences d’une révélation ?

Que signifient, en fait, ces interrogations de professionnels qui préfèrent dénoncer les effets néfastes de la divulgation de l’inceste plutôt que ceux de l’inceste lui-même ?

On se réfugie à l’abri du secret professionnel (repère ou repaire, pour A. Garapon), si souvent évoqué par les professionnels et si rarement par le citoyen, alors même que la notion de secret reste un élément fondamental de la situation incestueuse, où garder le secret, c’est limiter les échanges, les recours, et donc favoriser, voire pérenniser l’inceste.

Poser la question, se poser la question de l’existence d’un danger pour l’enfant, reste sans doute la première réponse, dans la mesure où cela oblige à sortir du cadre et à se référer à d’autres normes, d’autres lois que celles qui existent au sein de la famille. La principale caractéristique de la famille incestueuse est en effet son isolement, voire son enfermement (l’enfer-me-ment) en elle-même.

Le système « législatif » qui y règne n’est plus inscrit dans le système des autres règles; il n’y a plus de loi supérieure, fût-elle celle de l’inceste. N’est-ce pas d’ailleurs le plus souvent le « chef de famille » – demi-dieu ou souverain – qui, pour permettre la survie de sa famille, a aménagé la prohibition ? Dans la famille incestueuse, la fonction paternelle est toujours défaillante. Elle est remplacée par celle du « maître », lequel n’est plus ni le père, ni l’homme, ni l’époux, ni le compagnon.

En fait, poser la question du danger à une autorité extérieure, et pourquoi pas à la justice, est une nécessité absolue. Cette nécessité étant reconnue et admise, l’inceste est-il toujours significatif de dangers graves pour l’enfant ? Il suffit de décrire les symptômes objectifs présentés par les mineurs, ou même par les adultes confrontés à cette situation, pour s’en convaincre.

Cependant, la notion de danger ne réside pas seulement dans l’existence objective de ces symptômes ou dans les atteintes physiques ou affectives, mais également et surtout dans l’altération majeure opérée dans le continuum de la vie de l’enfant. Des phrases comme « on a confisqué, volé mon enfance » ou des formules comme « l’enfant inceste-tué » ne sont pas vaines, elles’ traduisent cette abolition ou, mieux, cette négation d’un état de transition, de passage. L’enfant, dans son statut, sa fonction est « phagocyté ».

_________________

Autres billets sur le livre De l’inceste par Françoise Héritier, Boris Cyrulnik et Aldo Naouri, Domnique Vrignaud & Margarita Xanthalou

1/ De l’inceste par Françoise Héritier, Boris Cyrulnik et Aldo Naouri
2/ Dorothée Dussy sur De l’inceste de Françoise Héritier
4/ Françoise Héritier et le principe de non-cumul de l’identique
5/ Docteur Aldo Naouri, vous êtes dangereusement irresponsable
Autres billets par Françoise Héritier
De l’inceste par Françoise Héritier, Boris Cyrulnik et Aldo Naouri


Loi n° 98-468 du 17 juin 1998

Loi n° 98-468 du 17 juin 1998 « relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs »

L’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AU SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE
Chapitre Ier
Dispositions modifiant le code pénal
Article 1er
Il est inséré, après l’article 131-36 du code pénal, une sous-section 6 ainsi rédigée :
« Sous-section 6
« Du suivi socio-judiciaire
« Art. 131-36-1. – Dans les cas prévus par la loi, la juridiction de jugement peut ordonner un suivi socio-judiciaire.
« Le suivi socio-judiciaire emporte, pour le condamné, l’obligation de se soumettre, sous le contrôle du juge de l’application des peines et pendant une durée déterminée par la juridiction de jugement, à des mesures de surveillance et d’assistance destinées à prévenir la récidive. La durée du suivi socio-judiciaire ne peut excéder dix ans en cas de condamnation pour délit ou vingt ans en cas de condamnation pour crime.
« La décision de condamnation fixe également la durée maximum de l’emprisonnement encouru par le condamné en cas d’inobservation des obligations qui lui sont imposées. Cet emprisonnement ne peut excéder deux ans en cas de condamnation pour délit et cinq ans en cas de condamnation pour crime. Les conditions dans lesquelles le juge de l’application des peines peut ordonner, en tout ou partie, l’exécution de l’emprisonnement sont fixées par le code de procédure pénale.
« Le président de la juridiction, après le prononcé de la décision, avertit le condamné des obligations qui en résultent et des conséquences qu’entraînerait leur inobservation.
« Art. 131-36-2. – Les mesures de surveillance applicables à la personne condamnée à un suivi socio-judiciaire sont celles prévues à l’article 132-44.
« Le condamné peut aussi être soumis par la décision de condamnation ou par le juge de l’application des peines aux obligations prévues à l’article 132-45. Il peut également être soumis à une ou plusieurs obligations suivantes :
« 1o S’abstenir de paraître en tout lieu ou toute catégorie de lieux spécialement désigné, et notamment les lieux accueillant habituellement des mineurs ;
« 2o S’abstenir de fréquenter ou d’entrer en relation avec certaines personnes ou certaines catégories de personnes, et notamment des mineurs, à l’exception, le cas échéant, de ceux désignés par la juridiction ;
« 3o Ne pas exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs.
« Art. 131-36-3. – Les mesures d’assistance auxquelles est soumise la personne condamnée à un suivi socio-judiciaire ont pour objet de seconder ses efforts en vue de sa réinsertion sociale.
« Art. 131-36-4. – Le suivi socio-judiciaire peut comprendre une injonction de soins.
« Cette injonction peut être prononcée par la juridiction de jugement s’il est établi après une expertise médicale, ordonnée dans les conditions prévues par le code de procédure pénale, que la personne poursuivie est susceptible de faire l’objet d’un traitement. Cette expertise est réalisée par deux experts en cas de poursuites pour meurtre ou assassinat d’un mineur précédé ou accompagné d’un viol, de tortures ou d’actes de barbarie. Le président avertit alors le condamné qu’aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement, mais que, s’il refuse les soins qui lui seront proposés, l’emprisonnement prononcé en application du troisième alinéa de l’article 131-36-1 pourra être mis à exécution.
« Lorsque la juridiction de jugement prononce une injonction de soins et que la personne a été également condamnée à une peine privative de liberté non assortie du sursis, le président informe le condamné qu’il aura la possibilité de commencer un traitement pendant l’exécution de cette peine.
« Art. 131-36-5. – Lorsque le suivi socio-judiciaire accompagne une peine privative de liberté sans sursis, il s’applique, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la privation de liberté a pris fin.
« Le suivi socio-judiciaire est suspendu par toute détention intervenue au cours de son exécution.
« L’emprisonnement ordonné en raison de l’inobservation des obligations résultant du suivi socio-judiciaire se cumule, sans possibilité de confusion, avec les peines privatives de liberté prononcées pour des infractions commises pendant l’exécution de la mesure.
« Art. 131-36-6. – Le suivi socio-judiciaire ne peut être ordonné en même temps qu’une peine d’emprisonnement assorti, en tout ou partie, du sursis avec mise à l’épreuve.
« Art. 131-36-7. – En matière correctionnelle, le suivi socio-judiciaire peut être ordonné comme peine principale.
« Art. 131-36-8. – Les modalités d’exécution du suivi socio-judiciaire sont fixées par le titre VII bis du livre V du code de procédure pénale. »
Article 2
Après l’article 221-9 du code pénal, il est inséré un article 221-9-1 ainsi rédigé :
« Art. 221-9-1. – Les personnes physiques coupables d’un meurtre ou d’un assassinat précédé ou accompagné d’un viol, de tortures ou d’actes de barbarie encourent également le suivi socio-judiciaire selon les modalités prévues par les articles 131-36-1 à 131-36-8. »
Article 3
La section 5 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal est complétée par un article 222-48-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-48-1. – Les personnes coupables des infractions définies aux articles 222-23 à 222-32 peuvent également être condamnées à un suivi socio-judiciaire selon les modalités prévues par les articles 131-36-1 à 131-36-8. »
Article 4
La section 6 du chapitre VII du titre II du livre II du code pénal est complétée par un article 227-31 ainsi rédigé :
« Art. 227-31. – Les personnes coupables des infractions définies aux articles 227-22 à 227-27 peuvent également être condamnées à un suivi socio-judiciaire selon les modalités prévues par les articles 131-36-1 à 131-36-8. »
Article 5
A l’article 131-10 du code pénal, il est inséré, après les mots : « retrait d’un droit », les mots : « , injonction de soins ou obligation de faire. »
Chapitre II
Dispositions modifiant le code de procédure pénale
Article 6
Le premier alinéa de l’article 721-1 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Sauf décision du juge de l’application des peines, prise après avis de la commission de l’application des peines, les personnes condamnées à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction de soins, et qui refusent de suivre un traitement pendant leur incarcération, ne sont pas considérées comme manifestant des efforts sérieux de réadaptation sociale. »
Article 7
L’article 721-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf décision du juge de l’application des peines, prise après avis de la commission de l’application des peines, les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux personnes condamnées pour l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 si, lorsque leur condamnation est devenue définitive, le casier judiciaire faisait mention d’une telle condamnation. »
Article 8
Il est créé, au livre V du code de procédure pénale, un titre VII bis ainsi rédigé :
« TITRE VII bis
« DU SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE
« Art. 763-1. – La personne condamnée à un suivi socio-judiciaire selon les modalités prévues par les articles 131-36-1 à 131-36-8 du code pénal est placée sous le contrôle du juge de l’application des peines dans le ressort duquel elle a sa résidence habituelle ou, si elle n’a pas en France de résidence habituelle, du juge de l’application des peines du tribunal dans le ressort duquel a son siège la juridiction qui a statué en première instance. Le juge de l’application des peines peut désigner le comité de probation et d’assistance aux libérés pour veiller au respect des obligations imposées au condamné. Les dispositions de l’article 740 sont applicables.
« Art. 763-2. – La personne condamnée à un suivi socio-judiciaire est tenue de justifier, auprès du juge de l’application des peines, de l’accomplissement des obligations qui lui sont imposées.
« Art. 763-3. – Pendant la durée du suivi socio-judiciaire, le juge de l’application des peines peut, après audition du condamné et avis du procureur de la République, modifier ou compléter les mesures prévues aux articles 131-36-2 et 131-36-3 du code pénal.
« Sa décision est exécutoire par provision. Elle peut être soumise à l’examen du tribunal correctionnel par le condamné ou le procureur de la République dans les conditions prévues par le troisième alinéa de l’article 739. Le juge de l’application des peines ne peut, à peine de nullité, siéger au sein du tribunal saisi de l’une de ses décisions.
« Le juge de l’application des peines peut également, s’il est établi après une expertise médicale ordonnée postérieurement à la décision de condamnation que la personne astreinte à un suivi socio-judiciaire est susceptible de faire l’objet d’un traitement, prononcer une injonction de soins. Cette expertise est réalisée par deux experts en cas de condamnation pour meurtre ou assassinat d’un mineur précédé ou accompagné d’un viol, de tortures ou d’actes de barbarie. Le juge de l’application des peines avertit le condamné qu’aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement, mais que, s’il refuse les soins qui lui seront proposés, l’emprisonnement prononcé en application du troisième alinéa de l’article 131-36-1 du code pénal pourra être mis à exécution. Les dispositions de l’alinéa précédent sont alors applicables.
« Art. 763-4. – Lorsque la personne condamnée à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction de soins doit exécuter cette mesure à la suite d’une peine privative de liberté, le juge de l’application des peines peut ordonner l’expertise médicale de l’intéressé avant sa libération. Cette expertise est obligatoire si la condamnation a été prononcée plus de deux ans auparavant.
« Le juge de l’application des peines peut en outre, à tout moment du suivi socio-judiciaire et sans préjudice des dispositions de l’article 763-6, ordonner, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, les expertises nécessaires pour l’informer sur l’état médical ou psychologique de la personne condamnée.
« Les expertises prévues par le présent article sont réalisées par un seul expert, sauf décision motivée du juge de l’application des peines.
« Art. 763-5. – En cas d’inobservation des obligations mentionnées aux articles 131-36-2 et 131-36-3 du code pénal ou de l’injonction de soins, le juge de l’application des peines peut, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, ordonner, par décision motivée, la mise à exécution de l’emprisonnement prononcé par la juridiction de jugement en application du troisième alinéa de l’article 131-36-1 du code pénal. L’exécution peut porter sur tout ou partie de cette peine. Cette décision est prise en chambre du conseil, à l’issue d’un débat contradictoire au cours duquel le juge de l’application des peines entend les réquisitions du procureur de la République et les observations du condamné ainsi que celles de son conseil. Cette décision est exécutoire par provision. Elle peut faire l’objet d’un appel dans les dix jours devant la chambre des appels correctionnels, qui statue dans le délai d’un mois.
« En cas d’inobservation des obligations ou de l’injonction de soins, le juge de l’application de peines peut délivrer un mandat d’amener contre le condamné.
« Si celui-ci est en fuite ou réside à l’étranger, il peut délivrer un mandat d’arrêt.
« Les dispositions des articles 122 à 124 et 126 à 134 sont alors applicables, les attributions du juge d’instruction étant exercées par le juge de l’application des peines.
« L’accomplissement de l’emprisonnement pour inobservation des obligations du suivi socio-judiciaire ne dispense pas le condamné de l’exécution du suivi socio-judiciaire. En cas de nouveau manquement par le condamné à ses obligations, le juge de l’application des peines peut de nouveau ordonner la mise à exécution de l’emprisonnement pour une durée qui, cumulée avec la durée de l’emprisonnement exécuté, ne saurait excéder celle fixée par la juridiction de condamnation.
« Art. 763-6. – Toute personne condamnée à un suivi socio-judiciaire peut demander à la juridiction qui a prononcé la condamnation ou, en cas de pluralité de condamnations, à la dernière juridiction qui a statué de la relever de cette mesure. Si la condamnation a été prononcée par une cour d’assises, la juridiction compétente pour statuer sur la demande est la chambre d’accusation dans le ressort de laquelle la cour d’assises a son siège.
« La demande ne peut être portée devant la juridiction compétente qu’à l’issue d’un délai d’un an à compter de la décision de condamnation. En cas de refus opposé à cette première demande, une autre demande ne peut être présentée qu’une année après cette décision de refus. Il en est de même, éventuellement, des demandes ultérieures.
« La demande de relèvement est adressée au juge de l’application des peines, qui ordonne une expertise médicale et la transmet à la juridiction compétente avec les conclusions de l’expert ainsi que son avis motivé.
« L’expertise est réalisée par deux experts en cas de condamnation pour meurtre ou assassinat d’un mineur précédé ou accompagné d’un viol, de tortures ou d’actes de barbarie.
« La juridiction statue dans les conditions prévues par les troisième, quatrième et cinquième alinéas de l’article 703.
« La juridiction peut décider de relever le condamné d’une partie seulement de ses obligations.
« Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque le suivi socio-judiciaire est prononcé comme peine principale.
« Art. 763-7. – Lorsqu’une personne condamnée à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction de soins doit subir une peine privative de liberté, elle exécute cette peine dans un établissement pénitentiaire prévu par le second alinéa de l’article 718 et permettant de lui assurer un suivi médical et psychologique adapté.
« Elle est immédiatement informée par le juge de l’application des peines de la possibilité d’entreprendre un traitement. Si elle ne consent pas à suivre un traitement, cette information est renouvelée au moins une fois tous les six mois.
« En cas de suspension ou de fractionnement de la peine, de placement à l’extérieur sans surveillance ou de mesure de semi-liberté, les obligations résultant du suivi socio-judiciaire sont applicables.
« Art. 763-8. – Lorsque le suivi socio-judiciaire est prononcé par une juridiction spéciale des mineurs, le juge des enfants, le tribunal pour enfants et la chambre spéciale des mineurs exercent les attributions dévolues par le présent titre au juge de l’application des peines, au tribunal correctionnel et à la chambre des appels correctionnels, jusqu’à la fin de la mesure de suivi socio-judiciaire, sauf si le juge des enfants se dessaisit au profit du juge de l’application des peines.
« Le juge des enfants désigne un service du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse pour veiller au respect des obligations imposées au condamné. Lorsque ce dernier a atteint l’âge de sa majorité, le juge des enfants peut désigner à cette fin le comité de probation et d’assistance aux libérés ; il peut également se dessaisir au profit du juge de l’application des peines.
« Art. 763-9. – Un décret en Conseil d’Etat détermine les modalités d’application des dispositions du présent titre. »
Chapitre III
Dispositions modifiant le code de la santé publique
Article 9
Il est créé, au livre III du code de la santé publique, un titre IX ainsi rédigé :
« TITRE IX
« DU SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE
« Art. L. 355-33. – Pour la mise en oeuvre de l’injonction de soins prévue par l’article 131-36-4 du code pénal, le juge de l’application des peines désigne, sur une liste de psychiatres, ou de médecins ayant suivi une formation appropriée, établie par le procureur de la République, un médecin coordonnateur qui est chargé :
« 1o D’inviter le condamné, au vu des expertises réalisées au cours de la procédure ainsi que, le cas échéant, au cours de l’exécution de la peine privative de liberté, à choisir un médecin traitant. En cas de désaccord persistant sur le choix effectué, le médecin est désigné par le juge de l’application des peines, après avis du médecin coordonnateur ;
« 2o De conseiller le médecin traitant, si celui-ci en fait la demande ;
« 3o De transmettre au juge de l’application des peines ou à l’agent de probation les éléments nécessaires au contrôle de l’injonction de soins ;
« 4o D’informer, en liaison avec le médecin traitant, le condamné dont le suivi socio-judiciaire est arrivé à son terme de la possibilité de poursuivre son traitement en l’absence de tout contrôle de l’autorité judiciaire et de lui indiquer les modalités et la durée qu’il estime nécessaires et raisonnables, à raison notamment de l’évolution des soins en cours.
« Art. L. 355-34. – Les rapports des expertises médicales réalisées pendant l’enquête ou l’instruction ainsi que, le cas échéant, le réquisitoire définitif, l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, l’arrêt de mise en accusation et le jugement ou l’arrêt de condamnation et, s’il y a lieu, toute autre pièce du dossier sont communiqués, à sa demande, au médecin traitant, par l’intermédiaire du médecin coordonnateur. Il en est de même des rapports des expertises ordonnées par le juge de l’application des peines en cours d’exécution, éventuellement, de la peine privative de liberté ou du suivi socio-judiciaire.
« Le médecin traitant délivre des attestations de suivi du traitement à intervalles réguliers, afin de permettre au condamné de justifier auprès du juge de l’application des peines de l’accomplissement de son injonction de soins.
« Art. L. 355-35. – Le médecin traitant est habilité, sans que puissent lui être opposées les dispositions de l’article 226-13 du code pénal, à informer le juge de l’application des peines ou l’agent de probation de l’interruption du traitement. Lorsque le médecin traitant informe le juge ou l’agent de probation, il en avise immédiatement le médecin coordonnateur.
« Le médecin traitant peut également informer de toutes difficultés survenues dans l’exécution du traitement le médecin coordonnateur qui est habilité, dans les mêmes conditions qu’à l’alinéa précédent, à prévenir le juge de l’application des peines ou l’agent de probation.
« Le médecin traitant peut également proposer au juge de l’application des peines d’ordonner une expertise médicale.
« Art. L. 355-36. – L’Etat prend en charge les dépenses afférentes aux interventions des médecins coordonnateurs.
« Art. L. 355-37. – Les modalités d’application du présent titre sont fixées par décret en Conseil d’Etat. »
TITRE II
DISPOSITIONS AYANT POUR OBJET DE PREVENIR ET DE REPRIMER LES INFRACTIONS SEXUELLES, LES ATTEINTES A LA DIGNITE DE LA PERSONNE HUMAINE ET DE PROTEGER LES MINEURS VICTIMES
Chapitre Ier
Dispositions modifiant le code pénal
Article 10
Il est inséré, après l’article 132-16 du code pénal, un article 132-16-1 ainsi rédigé :
« Art. 132-16-1. – Les délits d’agressions sexuelles et d’atteintes sexuelles sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction. »
Article 11
A l’article 222-23 du code pénal, les mots : « en usant d’ordres, de menaces ou de contraintes » sont remplacés par les mots : « en donnant des ordres, proférant des menaces, imposant des contraintes ou exerçant des pressions graves ».
Article 12
Il est rétabli, à l’article 222-45 du code pénal, un 3o ainsi rédigé :
« 3o L’interdiction d’exercer, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. »
Article 13
I. – L’article 222-24 du code pénal est complété par un 8o ainsi rédigé :
« 8o Lorsque la victime a été mise en contact avec l’auteur des faits grâce à l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination d’un public non déterminé, d’un réseau de télécommunications. »
II. – L’article 222-28 du code pénal est complété par un 6o ainsi rédigé :
« 6o Lorsque la victime a été mise en contact avec l’auteur des faits grâce à l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination d’un public non déterminé, d’un réseau de télécommunications. »
III. – Il est inséré, à l’article 225-7 du code pénal, un 10o ainsi rédigé :
« 10o Grâce à l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination d’un public non déterminé, d’un réseau de télécommunications. »
IV. – Le premier alinéa de l’article 227-22 du code pénal est complété par les mots : « ou lorsque le mineur a été mis en contact avec l’auteur des faits grâce à l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination d’un public non déterminé, d’un réseau de télécommunications ».
V. – Il est inséré, à l’article 227-26 du code pénal, un 5o ainsi rédigé :
« 5o Lorsque le mineur a été mis en contact avec l’auteur des faits grâce à l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination d’un public non déterminé, d’un réseau de télécommunications. »
Article 14
Il est inséré, après l’article 255-16 du code pénal, une section 3 bis ainsi rédigée :
« Section 3 bis
« Du bizutage
« Art. 225-16-1. – Hors les cas de violences, de menaces ou d’atteintes sexuelles, le fait pour une personne d’amener autrui, contre son gré ou non, à subir ou à commettre des actes humiliants ou dégradants lors de manifestations ou de réunions liées aux milieux scolaire et socio-éducatif est puni de six mois d’emprisonnement et de 50 000 F d’amende.
« Art. 225-16-2. – L’infraction définie à l’article 225-16-1 est punie d’un an d’emprisonnement et de 100 000 F d’amende lorsqu’elle est commise sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur.
« Art. 225-16-3. – Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121-2, des infractions commises lors de manifestations ou de réunions liées aux milieux scolaire et socio-éducatif prévues par les articles 225-16-1 et 225-16-2.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1o L’amende, suivant les modalités prévues par l’article 131-38 ;
« 2o Les peines mentionnées aux 4o et 9o de l’article 131-39. »
Article 15
I. – Au 1o de l’article 226-14 du code pénal, les mots : « de sévices ou de privations » sont remplacés par les mots : « de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes sexuelles ».
II. – Dans le premier alinéa de l’article 434-3 du code pénal, les mots : « de mauvais traitements ou privations » sont remplacés par les mots : « de privations, de mauvais traitements ou d’atteintes sexuelles ».
Article 16
I. – Dans les articles 222-12 et 222-13 du code pénal, il est inséré un 11o ainsi rédigé :
« 11o Lorsque les faits sont commis à l’intérieur d’un établissement scolaire ou éducatif, ou, à l’occasion des entrées ou des sorties des élèves, aux abords d’un tel établissement. »
II. – Il est inséré, au deuxième alinéa des articles 227-18, 227-18-1, 227-19 et 227-21 du code pénal, après les mots : « lorsqu’il s’agit d’un mineur de quinze ans », les mots : « ou que les faits sont commis à l’intérieur d’un établissement scolaire ou éducatif ou, à l’occasion des entrées ou des sorties des élèves, aux abords d’un tel établissement ».
III. – La deuxième phrase du premier alinéa de l’article 227-22 du code pénal est complétée par les mots : « ou que les faits sont commis à l’intérieur d’un établissement scolaire ou éducatif ou, à l’occasion des entrées ou des sorties des élèves, aux abords d’un tel établissement ».
Article 17
L’article 227-23 du code pénal est ainsi rédigé :
« Art. 227-23. – Le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d’enregistrer ou de transmettre l’image ou la représentation d’un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique est puni de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 F d’amende.
« Le fait de diffuser une telle image ou représentation, par quelque moyen que ce soit, de l’importer ou de l’exporter, de la faire importer ou de la faire exporter, est puni des mêmes peines.
« Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 F d’amende lorsqu’il a été utilisé, pour la diffusion de l’image ou de la représentation du mineur à destination d’un public non déterminé, un réseau de télécommunications.
« Les dispositions du présent article sont également applicables aux images pornographiques d’une personne dont l’aspect physique est celui d’un mineur, sauf s’il est établi que cette personne était âgée de dix-huit ans au jour de la fixation ou de l’enregistrement de son image. »
Article 18
A l’article 227-25 du code pénal, les mots : « deux ans d’emprisonnement et 200 000 F d’amende » sont remplacés par les mots : « cinq ans d’emprisonnement et 500 000 F d’amende ».
Article 19
I. – L’article 222-22 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les agressions sexuelles sont commises à l’étranger contre un mineur par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français, la loi française est applicable par dérogation au deuxième alinéa de l’article 113-6 et les dispositions de la seconde phrase de l’article 113-8 ne sont pas applicables. »
II. – Le dernier alinéa de l’article 227-26 du code pénal est supprimé.
III. – Il est inséré, après l’article 227-27 du code pénal, un article 227-27-1 ainsi rédigé :
« Art. 227-27-1. – Dans le cas où les infractions prévues par les articles 227-22, 227-23 ou 227-25 à 227-27 sont commises à l’étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français, la loi française est applicable par dérogation au deuxième alinéa de l’article 113-6 et les dispositions de la seconde phrase de l’article 113-8 ne sont pas applicables. »
Article 20
Il est inséré, après l’article 227-28 du code pénal, un article 227-28-1 ainsi rédigé :
« Art. 227-28-1. – Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121-2, des infractions prévues par les articles 227-18 à 227-26.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1o L’amende, suivant les modalités prévues par l’article 131-38 ;
« 2o Les peines mentionnées aux 2o, 3o, 4o, 5o, 7o, 8o et 9o de l’article 131-39.
« L’interdiction mentionnée au 2o de l’article 131-39 porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise.
« Dans le cas prévu par le 4o de l’article 227-26, la peine mentionnée au 1o de l’article 131-39 est également encourue. »
Article 21
L’article 227-29 du code pénal est complété par un 5o et un 6o ainsi rédigés :
« 5o La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit ;
« 6o L’interdiction, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. »
Article 22
Il est inséré, après l’article 450-3 du code pénal, un article 450-4 ainsi rédigé :
« Art. 450-4. – Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121-2, de l’infraction prévue par l’article 450-1.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1o L’amende, suivant les modalités prévues par l’article 131-38 ;
« 2o Les peines mentionnées à l’article 131-39.
« L’interdiction mentionnée au 2o de l’article 131-39 porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise. »
Chapitre II
Dispositions modifiant le code de procédure pénale
et concernant la protection des victimes
Article 23
L’article 2-2 du code de procédure pénale est complété par les mots : « ou, à défaut, celui du juge des tutelles saisi en application de l’article 389-3 du code civil. Cette condition n’est toutefois pas exigée lorsque les faits ont été commis à l’étranger et qu’il est fait application des dispositions du second alinéa de l’article 222-22 et de l’article 227-27-1 du code pénal ».
Article 24
A l’article 2-3 du code de procédure pénale, il est ajouté, après les mots : « de défendre ou d’assister l’enfance martyrisée », les mots : « ou les mineurs victimes d’atteintes sexuelles ».
Article 25
Le dernier alinéa de l’article 7 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Le délai de prescription de l’action publique des crimes commis contre des mineurs ne commence à courir qu’à partir de la majorité de ces derniers. »
Article 26
Le dernier alinéa de l’article 8 du code de procédure pénale est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le délai de prescription de l’action publique des délits commis contre des mineurs prévus et réprimés par les articles 222-9, 222-11 à 222-15, 222-27 à 222-30, 225-7, 227-22 et 227-25 à 227-27 du code pénal ne commence à courir qu’à partir de la majorité de ces derniers.
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, le délai de prescription est de dix ans lorsque la victime est mineure et qu’il s’agit de l’un des délits prévus aux articles 222-30 et 227-26 du code pénal. »
Article 27
Le premier alinéa de l’article 40 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu’il s’agit de faits commis contre un mineur et prévus et réprimés par les articles 222-23 à 222-32 et 227-22 à 227-27 du code pénal, l’avis de classement doit être motivé et notifié par écrit. »
Article 28
Il est créé, au livre IV du code de procédure pénale, un titre XIX ainsi rédigé :
« TITRE XIX
« DE LA PROCEDURE APPLICABLE AUX INFRACTIONS DE NATURE SEXUELLE ET DE LA PROTECTION DES MINEURS VICTIMES
« Art. 706-47. – Les personnes poursuivies pour le meurtre ou l’assassinat d’un mineur précédé ou accompagné d’un viol, de tortures ou d’actes de barbarie ou pour l’une des infractions visées aux articles 222-23 à 222-32 et 227-22 à 227-27 du code pénal doivent être soumises, avant tout jugement sur le fond, à une expertise médicale. L’expert est interrogé sur l’opportunité d’une injonction de soins dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire.
« Cette expertise peut être ordonnée dès le stade de l’enquête par le procureur de la République.
« Cette expertise est communiquée à l’administration pénitentiaire en cas de condamnation à une peine privative de liberté, afin de faciliter le suivi médical et psychologique en détention prévu par l’article 718.
« Art. 706-48. – Les mineurs victimes de l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 peuvent faire l’objet d’une expertise médico-psychologique destinée à apprécier la nature et l’importance du préjudice subi et à établir si celui-ci rend nécessaires des traitements ou des soins appropriés.
« Une telle expertise peut être ordonnée dès le stade de l’enquête par le procureur de la République.
« Art. 706-49. – Le procureur de la République ou le juge d’instruction informe sans délai le juge des enfants de l’existence d’une procédure concernant un mineur victime de l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 et lui en communique toutes pièces utiles, dès lors qu’une procédure d’assistance éducative a été ouverte à l’égard du mineur victime de cette infraction.
« Art. 706-50. – Le procureur de la République ou le juge d’instruction, saisi de faits commis volontairement à l’encontre d’un mineur, désigne un administrateur ad hoc lorsque la protection des intérêts de celui-ci n’est pas complètement assurée par ses représentants légaux ou par l’un d’entre eux. L’administrateur ad hoc assure la protection des intérêts du mineur et exerce, s’il y a lieu, au nom de celui-ci les droits reconnus à la partie civile. En cas de constitution de partie civile, le juge fait désigner un avocat d’office pour le mineur s’il n’en a pas déjà été choisi un.
« Les dispositions qui précèdent sont applicables devant la juridiction de jugement.
« Art. 706-51. – L’administrateur ad hoc nommé en application de l’article précédent est désigné par le magistrat compétent, soit parmi les proches de l’enfant, soit sur une liste de personnalités dont les modalités de constitution sont fixées par décret en Conseil d’Etat. Ce décret précise également les conditions de leur indemnisation.
« Art. 706-52. – Au cours de l’enquête et de l’information, l’audition d’un mineur victime de l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 fait, avec son consentement ou, s’il n’est pas en état de le donner, celui de son représentant légal, l’objet d’un enregistrement audiovisuel.
« L’enregistrement prévu à l’alinéa précédent peut être exclusivement sonore si le mineur ou son représentant légal en fait la demande.
« Lorsque le procureur de la République ou le juge d’instruction décide de ne pas procéder à cet enregistrement, cette décision doit être motivée.
« Le procureur de la République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire chargé de l’enquête ou agissant sur commission rogatoire peut requérir toute personne qualifiée pour procéder à cet enregistrement. Les dispositions de l’article 60 sont applicables à cette personne, qui est tenue au secret professionnel dans les conditions de l’article 11.
« Il est par ailleurs établi une copie de l’enregistrement aux fins d’en faciliter la consultation ultérieure au cours de la procédure. Cette copie est versée au dossier. L’enregistrement original est placé sous scellés fermés.
« Sur décision du juge d’instruction, l’enregistrement peut être visionné ou écouté au cours de la procédure. La copie de ce dernier peut toutefois être visionnée ou écoutée par les parties, les avocats ou les experts, en présence du juge d’instruction ou d’un greffier.
« Les huit derniers alinéas de l’article 114 du code de procédure pénale ne sont pas applicables à l’enregistrement. La copie de ce dernier peut toutefois être visionnée par les avocats des parties au palais de justice dans des conditions qui garantissent la confidentialité de cette consultation.
« Le fait, pour toute personne, de diffuser un enregistrement ou une copie réalisée en application du présent article est puni d’un an d’emprisonnement et de 100 000 F d’amende.
« A l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la date de l’extinction de l’action publique, l’enregistrement et sa copie sont détruits dans le délai d’un mois.
« Art. 706-53. – Au cours de l’enquête ou de l’information, les auditions ou confrontations d’un mineur victime de l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 sont réalisées sur décision du procureur de la République ou du juge d’instruction, le cas échéant à la demande du mineur ou de son représentant légal, en présence d’un psychologue ou d’un médecin spécialistes de l’enfance ou d’un membre de la famille du mineur ou de l’administrateur ad hoc désigné en application de l’article 706-50 ou encore d’une personne chargée d’un mandat du juge des enfants.
« Art. 706-54. – Il est créé un fichier national automatisé destiné à centraliser les traces génétiques ainsi que les empreintes génétiques des personnes condamnées pour l’une des infractions visées à l’article 706-47 en vue de faciliter l’identification et la recherche des auteurs d’infractions sexuelles.
« Ce fichier est placé sous le contrôle d’un magistrat.
« Les modalités d’application du présent article , y compris la durée de conservation des informations enregistrées, sont déterminées par décret en Conseil d’Etat après avis de la Commission nationale de l’Informatique et des Libertés.
« Les empreintes génétiques des personnes à l’encontre desquelles il existe des indices graves et concordants de nature à motiver leur mise en examen pour l’une des infractions visées à l’article 706-47 peuvent faire l’objet, à la demande du juge d’instruction ou du procureur de la République, d’un rapprochement avec les données incluses au fichier. Elles ne peuvent toutefois y être conservées. »
Article 29
Dans la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article 722 du code de procédure pénale, après les mots : « réductions de peines », sont insérés les mots : « n’entraînant pas de libération immédiate ».
Article 30
Dans la première phrase du cinquième alinéa de l’article 722 du code de procédure pénale, les mots : « pour le meurtre ou l’assassinat d’un mineur de quinze ans » sont remplacés par les mots : « pour meurtre ou assassinat d’un mineur ».
Article 31
L’article L. 322-3 du code de la sécurité sociale est complété par un 15o ainsi rédigé :
« 15o Pour les soins consécutifs aux sévices subis par les mineurs victimes d’actes prévus et réprimés par les articles 222-23 à 222-32 et 227-22 à 227-27 du code pénal. »
Chapitre III
Dispositions relatives à l’interdiction de mise
à disposition de certains documents aux mineurs
Article 32
La mise à la disposition du public de tout document fixé soit sur support magnétique, soit sur support numérique à lecture optique, soit sur support semi-conducteur, tel que vidéocassette, vidéodisque, jeu électronique, est soumise aux dispositions du présent chapitre.
Toutefois, ces dispositions ne s’appliquent pas aux documents, autres que ceux mentionnés à l’article 34, qui constituent la reproduction intégrale d’une oeuvre cinématographique ayant obtenu le visa prévu à l’article 19 du code de l’industrie cinématographique.
Lorsque le document mentionné au premier alinéa présente un danger pour la jeunesse en raison de son caractère pornographique ou de la place faite au crime, à la violence, à la discrimination ou à la haine raciales, à l’incitation à l’usage, à la détention ou au trafic de stupéfiants, l’autorité administrative peut, par arrêté motivé et après avis de la commission mentionnée à l’article 33, interdire :
1o De le proposer, de le donner, de le louer ou de le vendre à des mineurs ;
2o De faire en faveur de ce document de la publicité par quelque moyen que ce soit. Toutefois, la publicité demeure possible dans les lieux dont l’accès est interdit aux mineurs.
En fonction du degré de danger pour la jeunesse que présente le document, l’autorité administrative prononce la première interdiction ou les deux interdictions conjointement.
L’arrêté d’interdiction est publié au Journal officiel de la République française.
Un décret en Conseil d’Etat précise, en tant que de besoin, les catégories de documents qui peuvent faire l’objet d’une interdiction.
Article 33
Il est institué une commission administrative chargée de donner un avis sur les mesures d’interdiction envisagées.
Cette commission comprend, outre son président choisi parmi les membres du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation, des représentants de l’administration, des professionnels des secteurs concernés et des personnes chargées de la protection de la jeunesse. La composition et les modalités de fonctionnement de cette commission sont fixées par décret en Conseil d’Etat.
La commission a également qualité pour signaler à l’autorité administrative les documents mentionnés à l’article précédent qui lui paraissent justifier une interdiction.
Article 34
Les documents mentionnés à l’article 32 reproduisant des oeuvres cinématographiques auxquelles s’appliquent les articles 11 et 12 de la loi de finances pour 1976 (no 75-1278 du 30 décembre 1975) sont soumis de plein droit à l’interdiction prévue au 1o dudit article .
L’autorité administrative peut, en outre, prononcer à l’égard de ces documents, après avis de la commission mentionnée à l’article 33, l’interdiction prévue au 2o de l’article 32.
L’éditeur ou le producteur ou l’importateur ou le distributeur chargé de la diffusion en France du support soumis à l’interdiction de plein droit prévue au premier alinéa peut demander à en être relevé. L’autorité administrative se prononce après avis de la commission mentionnée à l’article 33.
Article 35
Les interdictions prévues aux articles 32 et 34 doivent être mentionnées de façon apparente sur chaque unité de conditionnement des exemplaires édités et diffusés.
Un décret en Conseil d’Etat détermine les modalités d’application du présent article , et notamment le délai dans lequel la mesure prévue doit être mise en oeuvre et les sanctions en cas d’inexécution de cette obligation.
Article 36
Le fait de contrevenir aux interdictions prononcées conformément à l’article 32 ou à celles résultant de l’article 34 est puni d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 100 000 F.
Article 37
Le fait, par des changements de titres ou de supports, des artifices de présentation ou de publicité ou par tout autre moyen, d’éluder ou de tenter d’éluder l’application des dispositions de l’article 32 ou de l’article 34 est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 200 000 F.
Article 38
Les personnes physiques coupables des infractions prévues aux articles 36 et 37 encourent également la peine complémentaire de confiscation de la chose qui a servi à commettre l’infraction ou était destinée à la commettre ou de la chose qui en est le produit.
Article 39
Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables des infractions mentionnées aux articles 36 et 37 dans les conditions prévues par l’article 121-2 du code pénal.
Les peines encourues par les personnes morales sont :
– l’amende, suivant les modalités prévues par l’article 131-38 du code pénal ;
– la confiscation prévue par le 8o de l’article 131-39 du code pénal.
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES ET DE COORDINATION
Article 40
Il est inséré, après l’article 873 du code de procédure pénale, un article 873-1 ainsi rédigé :
« Art. 873-1. – Le premier alinéa de l’article 763-7 est ainsi rédigé :
« « Lorsqu’une personne condamnée à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction de soins doit subir une peine privative de liberté, elle exécute cette peine dans un établissement pénitentiaire permettant de lui assurer un suivi médical et psychologique adapté. » »
Article 41
I. – L’article 133-16 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, lorsque la personne a été condamnée au suivi socio-judiciaire prévu à l’article 131-36-1 ou à la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, la réhabilitation ne produit ses effets qu’à la fin de la mesure. »
II. – Le dernier alinéa de l’article 736 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette disposition ne s’applique pas au suivi socio-judiciaire prévu à l’article 131-36-1 du code pénal ou à la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. »
III. – Le dernier alinéa de l’article 746 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette disposition ne s’applique pas à la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. »
IV. – Le cinquième alinéa (4o) de l’article 775 du code de procédure pénale est complété par les mots : « ; toutefois, si a été prononcé le suivi socio-judiciaire prévu par l’article 131-36-1 du code pénal ou la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, la décision continue de figurer au bulletin no 2 pendant la durée de la mesure ; ».
V. – Après l’avant-dernier alinéa (3o) de l’article 777 du code de procédure pénale, il est inséré un 4o ainsi rédigé :
« 4o Décisions prononçant le suivi socio-judiciaire prévu par l’article 131-36-1 du code pénal ou la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, pendant la durée de la mesure. »
Article 42
Il est inséré, après l’article 901 du code de procédure pénale, un article 902 ainsi rédigé :
« Art. 902. – Le premier alinéa de l’article 763-7 est ainsi rédigé :
« « Lorsqu’une personne condamnée à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction de soins doit subir une peine privative de liberté, elle exécute cette peine dans un établissement pénitentiaire permettant de lui assurer un suivi médical et psychologique adapté. » »
Article 43
L’article 2270-1 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le dommage est causé par des tortures et des actes de barbarie, des violences ou des agressions sexuelles commises contre un mineur, l’action en responsabilité civile est prescrite par vingt ans. »
Article 44
Il est inséré, après le sixième alinéa (c) de l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, un alinéa ainsi rédigé :
« Les deux alinéas a et b qui précèdent ne s’appliquent pas lorsque les faits sont prévus et réprimés par les articles 222-23 à 222-32 et 227-22 à 227-27 du code pénal et ont été commis contre un mineur. »
Article 45
A l’article 20-4 de l’ordonnance no 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, les mots : « et les peines prévues par les articles 131-25 à 131-35 du code pénal » sont remplacés par les mots : « et les peines de jour-amende, d’interdiction des droits civiques, civils et de famille, d’interdiction d’exercer une fonction publique ou une activité professionnelle ou sociale, d’interdiction de séjour, de fermeture d’établissement, d’exclusion des marchés publics et d’affichage ou de diffusion de la condamnation ».
Article 46
Le 4 de l’article 38 du code des douanes est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les dispositions du présent article s’appliquent également aux objets de toute nature comportant des images ou des représentations d’un mineur à caractère pornographique visées par l’article 227-23 du code pénal. »
Article 47
Lorsqu’un crime ou un délit a été commis à l’intérieur de l’enceinte d’un établissement scolaire ou lorsqu’il a concerné, aux abords immédiats de cet établissement, un élève de celui-ci ou un membre de son personnel, le ministère public avise le chef de l’établissement concerné de la date et de l’objet de l’audience de jugement par lettre recommandée adressée dix jours au moins avant la date de l’audience. Lorsqu’il est fait application des articles 395 à 397-5 du code de procédure pénale, cet avis est adressé dans les meilleurs délais et par tout moyen.
Article 48
Les nouvelles dispositions de l’article 706-52 du code de procédure pénale entreront en vigueur au plus tard le 1er juin 1999.
Article 49
L’article 87-1 du code de procédure pénale est abrogé.
Article 50
Les dispositions des articles 7 et 8 du code de procédure pénale, dans leur rédaction résultant des articles 25 et 26 de la présente loi, sont applicables aux infractions non encore prescrites lors de l’entrée en vigueur de la présente loi.
Article 51
La présente loi est, à l’exception de ses articles 31 et 46, applicable dans les territoires d’outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.
La présente loi sera exécutée comme loi de l’Etat.
Fait à Paris, le 17 juin 1998.
Jacques Chirac
Par le Président de la République :
Le Premier ministre,
Lionel Jospin
La ministre de l’emploi et de la solidarité,
Martine Aubry
Le garde des sceaux, ministre de la justice,
Elisabeth Guigou
Le ministre de l’intérieur,
Jean-Pierre Chevènement
La ministre de la culture et de la communication,
Catherine Trautmann
Le secrétaire d’Etat à la santé,
Bernard Kouchner
Le secrétaire d’Etat à l’outre-mer,
Jean-Jack Queyranne
(1) Travaux préparatoires : loi no 98-468.
Assemblée nationale :
Projet de loi no 202 ;
Rapport de Mme Frédérique Bredin, au nom de la commission des lois, no 228 ;
Discussion et adoption les 30 septembre et 1er octobre 1997.
Sénat :
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, no 11 (1997-1998) ;
Rapport de M. Charles Jolibois, au nom de la commission des lois, no 49 (1997-1998) ;
Avis de M. Jacques Bimbenet, au nom de la commission des affaires sociales, no 51 (1997-1998) ;
Discussion les 28, 29 et 30 octobre 1997 et adoption le 30 octobre 1997.
Assemblée nationale :
Projet de loi, modifié par le Sénat, no 397 ;
Rapport de Mme Frédérique Bredin, au nom de la commission des lois, no 622 ;
Discussion et adoption le 20 janvier 1998.
Sénat :
Projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, no 234 (1997-1998) ;
Rapport de M. Charles Jolibois, au nom de la commission des lois, no 265 (1997-1998) ;
Discussion et adoption le 31 mars 1998.
Assemblée nationale :
Projet de loi, modifié par le Sénat en deuxième lecture, no 812 ;
Rapport de Mme Frédérique Bredin, au nom de la commission mixte paritaire, no 906 ;
Discussion et adoption (procédure d’examen simplifiée) le 3 juin 1998.
Sénat :
Rapport de M. Charles Jolibois, au nom de la commission mixte paritaire, no 435 (1997-1998) ;
Discussion et adoption le 4 juin 1998.