Existe-t-il un lien entre cancer et émotions ?

Existe-t-il un lien entre cancer et émotions ?
Malgré des dépistages précoces et des traitements de plus en plus efficaces, le cancer reste un fléau dont nous ne savons pas tout. Le corps médical pointe du doigt l’influence des émotions sur le déclenchement du cancer et son évolution. Que faut-il en penser ?
Bien que le facteur héréditaire soit important, le cancer reste une maladie étroitement liée à l’environnement (pollution, pesticides, etc…) et aux habitudes de vie (alimentation, tabagisme, activité physique, etc…). Depuis plusieurs décennies, de nombreuses études se penchent aussi sur l’influence des émotions de l’individu dans le développement du cancer. Cependant, il est difficile de prouver qu’il y a une interdépendance entre le corps et l’esprit et qu’elle soit si forte qu’elle puisse avoir un rôle clé dans le développement ou la guérison d’un cancer.
On sait aujourd’hui que près d’une personne sur 2 sera touchée par le cancer au cours de sa vie 1 ; un chiffre élevé qui nécessite de se pencher néanmoins sur la question.
La prévention du cancer, le dépistage et les soins permettent à de nombreux patients de guérir. Mais encore faut-il se sentir capable de passer ces stades physiquement et émotionnellement difficiles. Pour les personnes vivant au quotidien avec un cancer, la compréhension et la maîtrise des émotions semblent influencer considérablement sur le processus de guérison 2. Pour les patients qui se savent malheureusement condamnés, c’est un moyen d’accepter la maladie et de faire face à la mort en gardant à l’esprit que chaque moment de vie est important. Nous sommes chaque jour confrontés à l’influence de nos émotions sur notre état d’esprit, alors pourquoi ne pas imaginer qu’elles puissent aussi influencer la maladie et sa guérison ? N’est-ce pas un moyen de voir naître des approches alternatives pour accompagner les personnes atteintes d’un cancer ?

La santé émotionnelle, vectrice d’un bon état de santé général

Selon l’association médicale américaine, 75% des problèmes de santé sont causés par nos émotions 3. On entend par exemple souvent dire que le stress est l’ennemi n°1 de la santé. Mais il existe aussi d’autres émotions primaires négatives comme la colère, la tristesse, la solitude, l’ennui, la culpabilité et l’inadéquation 4 qui peuvent nous atteindre moralement. Il faut donc lutter chaque jour afin qu’elles n’aient pas de conséquences néfastes sur notre santé.

Le Dr C. Boukaram, oncologue canadien

et auteur du livre « Le pouvoir anti-cancer des émotions », rappelle que notre environnement a une forte influence sur nos émotions et qu’il est important d’y apporter des activités positives comme :
• L’art. Qu’il s’agisse de musique, de peinture, de sculpture ou de danse, l’art est l’expression des sens et des émotions : c’est un moyen d’extérioriser ce que l’on ressent. Il peut avoir de nombreux bienfaits pour les personnes malades qui s’exprimeront à travers leurs œuvres.
• Rire et sourire. Une étude menée récemment par des psychologues de l’université du Kansas aux États-Unis montre que la sensation de bien-être s’améliorerait en souriant et jouerait sur la diminution du stress.
• Communiquer. Garder le dialogue avec sa famille, ses amis et collègues est essentiel. Le lien social permet d’échapper à une solitude souvent redoutée et de se sentir soutenu.e et écouté.e dans les phases importantes de nos vies.
• Comprendre ses émotions. Pour pallier aux conséquences néfastes de nos émotions, il est important de faire le point sur ce que l’on ressent. Pourquoi ? Quel est l’élément déclencheur ? Quelles en sont les conséquences psychologiques ? Sans cela, il sera difficile de les contrôler ou de les anticiper. Comprendre ce que l’on ressent, c’est aussi se comprendre soi-même… Il est possible d’envisager une psychothérapie, où le psychologue aiguillera le patient afin qu’il puisse mieux décoder ce qu’il ressent…

1. http://curie.fr/sites/default/files/campagne-une-personne-sur-deux.pdf
2. Le pouvoir anticancer des émotions, Dr Christian Boukaram, éditions de l’Homme
3. ABRAMS, D. et Weil, A. Integrative Oncology, Oxford University Press, 2009.
4. BANYAN, Calvin D. The Secret Language of Feelings : A Rational Approach to Emotional Mastery, Banyan Hypnosis Center, 2002.

Pour joindre l’article, cliquez sur l’image sur chevalet

Lorsque l’art thérapie à l’hôpital aide les enfants à surmonter le traitement du cancer


Lorsque l’art thérapie à l’hôpital aide les enfants à surmonter le traitement du cancer
Marion BOTHOREL
06/10/2018
Depuis deux semaines, dans deux hôpitaux de Beyrouth, des ateliers d’art thérapie sont proposés par la Fondation Saja aux enfants touchés par le cancer.
« Peindre, c’était son échappatoire, son espace à elle, loin du cancer. Ses mains étaient tordues par la douleur mais elle peignait, assise sur le sol, elle peignait tout ce qu’elle pensait. » Pour son mari, Karim Dada, c’est par l’art que Saja Dada Tourbah est parvenue à s’échapper un peu de l’atmosphère de sa chambre d’hôpital pendant la terrible année qui a fini par emporter, en octobre dernier, la jeune architecte de 27 ans.

Un fond sombre d’où s’échappent des nuances de jaune, de bleu… Pour Saria Tourbah, la sœur de Saja, les peintures laissées par Saja délivrent « un message puissant : une transition du noir vers une échappée, plus joyeuse ». Docteurs et infirmières se succédaient dans sa chambre pour voir ses peintures, impressionnés par la force de l’art pour faire face au cancer.

Avec l’aide de la famille de Saja, Karim et Saria ont lancé depuis Londres une fondation qui porte son nom, Saja. Ils ont lancé ce projet pour offrir des moments d’évasion aux enfants touchés par le cancer : « Saja savait ce que nous allions faire. Si les enfants pouvaient changer d’atmosphère grâce à l’art, nous devions, nous, faire tout ce qui était en notre pouvoir pour leur donner cette opportunité », indique Karim.

C’est désormais chose faite. Depuis deux semaines et dans deux hôpitaux de Beyrouth, des ateliers artistiques sont proposés aux enfants atteints par le cancer. L’histoire de Saja, Karim, Saria, de leur famille a touché un grand nombre de personnes, plus précisément en Grande-Bretagne où Saja vivait, aux États-Unis où elle a étudié, et au Liban, d’où elle venait. Yasmine Farah connaissait Saja, notamment sa capacité à apporter une touche artistique à chacun de ses dessins d’architecte. Intervenir dans les hôpitaux pour la fondation qui porte son nom, c’était une évidence : « Cela faisait des années que je voulais le faire, mais seule, ça me paraissait impossible. Je savais que Saja allait m’aider », confie-t-elle depuis l’atelier Dada, le sien, situé au cœur du quartier d’Achrafieh.

Deux ou trois heures de bonheur

En plus de ce soutien, plusieurs autres facteurs ont accéléré la mise en place de ces ateliers : des donations de l’ordre de 100 000 dollars récoltés lors d’une exposition et un dîner dans une galerie d’art abandonnée – un rêve de Saja – et un partenariat avec MySchoolPulse. Cette ONG délocalise depuis dix ans l’école dans six hôpitaux de Beyrouth auprès d’enfants âgés de 5 à 10 ans et au pronostic vital engagé.

Et ça fonctionne. Mirella, Pierre, Perla, Rita ou encore Alaa se sont inspirés des peintres Frida Kahlo, Niki de Saint Phalle ou Friedrich Stowasser, guidés par Yasmine Farah. Depuis trois semaines, l’artiste se rend deux matinées par semaine dans un hôpital de Beyrouth : « Ils m’attendent avec impatience, ils peuvent être fatigués mais dès que je passe la porte de leur chambre, ils s’éveillent d’un coup. Une maman m’a dit que sa fille ne voulait pas rentrer dormir chez elle car elle voulait peindre à nouveau le lendemain. » Alors elle a laissé des pinceaux, des couleurs et du papier dans un coffre, à l’hôpital. Yasmine Farah veut aller plus loin, elle poursuit un but : « Remplir les hôpitaux de jeunes artistes. » Lors de ses prochaines vacances, elle veut partir à Londres se former à l’art thérapie pour que tous les hôpitaux du Liban puissent proposer ces ateliers aux enfants. « On leur interdit de dormir avec leurs frères et sœurs, on leur interdit de se rendre à l’école, c’est juste deux ou trois heures de bonheur, on leur doit ça », martèle Yasmine alors que son cours d’aquarelle débute dans son atelier.

C’était exactement l’objectif que Saria voulait atteindre : « Les enfants sont supposés s’amuser comme ils le feraient à l’école à cet âge-là, ça les aide à avoir l’esprit occupé à autre chose que la maladie et à exprimer ce qu’ils ressentent. »

Depuis l’Angleterre et l’Espagne où ils résident, Karim et Saria reçoivent tous les lundis matin par mail les dessins réalisés par les enfants. Un moment très attendu par Karim : « Nous n’avons pas une interaction directe avec eux mais nous voyons ce qu’ils font, nous voyons leurs sourires dans leurs peintures, nous les voyons heureux. »

Les dons récoltés lors des événements précédents ont été placés, assurant la longévité de la fondation. En parallèle, Saja Fondation s’est lancée dans le mécénat d’artistes émergents, leur procurant un logement, des collaborations avec les meilleurs artistes et une exposition mondiale. Une œuvre monumentale du parrain de cette première année, Do Ho Suh, a pris place dans le paysage londonien pour une durée de trois ans. La grandeur de l’art pour tous, quelle que soit la fenêtre.

Pour lire l’article, cliquez sur le logo L’Orient le jour